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Le Cameroun explore les peines alternatives pour désengorger ses prisons


Cyrille Rolande Bechon dirige l’ONG "Nouveaux droits de l’homme", initiatrice du plaidoyer sur les peines alternatives à l’emprisonnement à Yaoundé, le 9 décembre 2020. (VOA/Emmanuel Jules Ntap)
Cyrille Rolande Bechon dirige l’ONG "Nouveaux droits de l’homme", initiatrice du plaidoyer sur les peines alternatives à l’emprisonnement à Yaoundé, le 9 décembre 2020. (VOA/Emmanuel Jules Ntap)

Les organisations de la société civile, sous la houlette de l’ONG Nouveaux droits de l’homme, ont initié une campagne de plaidoyer pour les peines alternatives à l’emprisonnement au Cameroun.

Le 12 juillet 2016, la loi sur le code pénal instaure les peines alternatives au Cameroun et reconnaît le travail d’intérêt général ainsi que la sanction - réparation comme peines alternatives à l’emprisonnement au Cameroun. Cette disposition s’applique exclusivement à certains justiciables.

"Les peines alternatives concernent les personnes qui ont commis des délits et qui sont passibles de sanctions de moins de deux ans d’emprisonnement", précise Cyrille Rolande Bechon, directrice exécutive de l'ONG Nouveaux droits de l’homme.

Une voiture destinée au transport des prisonniers à la prison centrale de Yaoundé, le 14 décembre 2020.
Une voiture destinée au transport des prisonniers à la prison centrale de Yaoundé, le 14 décembre 2020.

Désengorger les prisons

Face au parlement en juin 2019, le ministre délégué à la Justice a annoncé la soumission imminente d’un projet de loi sur l’application des peines alternatives. Plus d’un an après, la chaîne judiciaire et les acteurs des droits de l’homme demeurent dans l’attente.

"Toute la difficulté part du fait que l’article 26 alinéa 2 du code pénal issu de la réforme de la loi 2019 du 12 juillet 2016 portant code pénal dit clairement que les modalités de mise en œuvre d’application seront fixées par un texte ultérieur", fait remarquer Dr Stéphane Teche, enseignant à l’université de Dschang.

Les 22 et 23 juillet 2019, les mutineries sont déclenchées dans la prison centrale de Kodengui à Yaoundé et à la prison principale de Buea dans la zone anglophone. Les prisonniers se plaignaient de la surpopulation carcérale dans un contexte de la maladie Covid-19.

En novembre dernier, il y a eu des heurts entre policiers et avocats dans une salle d’audience à Douala. Les avocats ont tenté de s’opposer à l’emprisonnement de leurs confrères soupçonnés de corruption de magistrats. "Ces situations auraient pu être évitées si le texte d’application sur les peines alternatives à l’emprisonnement avait été pris", commente l’enseignant juriste Stéphane Teche.

Agir en attendant le décret présidentiel

Selon la Commission nationale des droits de l’homme et des libertés, un organe indépendant, au 31 décembre 2017, la population carcérale s’élevait à 30.701 prisonniers, largement au-dessus des capacités d’accueil, estimées durant la même période à 17.815 places dans l’ensemble des maisons d’arrêt du Cameroun.

"On peut attendre le décret encore un peu plus longtemps, je crois qu’en l’état des choses on pourrait aussi penser à une approche qui vise une expérimentation pilote des peines alternatives dans le cas de certains détenus et cela permettra d’expérimenter ce qu’on souhaite faire", suggère Eva Etounguè, secrétaire général de la Commission nationale des droits de l’homme et des libertés.

Plus d'une trentaine d'experts réunis à Yaoundé lors du Symposium national sur les peines alternatives ont déploré que les détentions provisoires continuent à être la règle pour des délits parfois mineurs, qui même en cas de reconnaissance de la culpabilité, la peine n'excéderait pas deux années d’emprisonnement.

"Toutes ces personnes qui sont emprisonnées renforcent la surpopulation carcérale et n’apportent rien à la société, au contraire, elles deviennent une charge parce que leur emprisonnement a un coût. Pourtant avec les peines alternatives, on leur donne l’occasion d’apporter quelque chose de plus à la société dans laquelle ils sont issus et ceci renforce un sentiment de justice sociale", explique Cyrille Rolande Bechon.

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