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La nomination aux Oscars, un "nouveau souffle" pour l'opposant ougandais Bobi Wine


Le documentaire "Bobi Wine: le président du peuple" consacré à l'opposant ougandais a été nominé aux Oscars.
Le documentaire "Bobi Wine: le président du peuple" consacré à l'opposant ougandais a été nominé aux Oscars.

Chanteur devenu homme politique et premier opposant au président ougandais, Bobi Wine est le héros d'un documentaire nominé aux Oscars qu'il considère comme une assurance-vie face à la répression et lui donne "un nouveau souffle" dans son combat.

"Bobi Wine: le président du peuple" raconte sa campagne pour la présidentielle de janvier 2021, où il était le principal adversaire du chef de l'Etat Yoweri Museveni, s'opposant à un sixième mandat de l'ancien guérillero qui dirige depuis 1986 ce pays d'Afrique de l'Est.

M. Museveni avait été réélu avec 58% des voix, devant Bobi Wine (35%) qui avait dénoncé une "mascarade". La campagne avait été marquée par le harcèlement et des arrestations de membres de l'opposition, des agressions de journalistes et la mort d'au moins 54 personnes dans des manifestations en novembre 2020 après une énième arrestation de Bobi Wine, dont la campagne avait été largement entravée au nom des restrictions anti-Covid.

"Que le film aille aux Oscars est comme un nouveau souffle pour moi. Cela me (fait me sentir) plus en sécurité, ainsi que ma famille et mes collègues", déclare l'opposant, de son vrai nom Robert Kyagulanyi, qui fêtera ses 42 ans le 12 février.

"Nous savons qu'au moins, le monde regarde ce qu'il se passe en Ouganda", ajoute-t-il dans un entretien accordé au siège de son parti, la Plateforme d'unité nationale (NUP), situé dans une banlieue défavorisée de la capitale Kampala et gardé par des bénévoles non armés. Bobi Wine ne cache pas avoir été "hésitant au départ" quand les réalisateurs Christopher Sharp et Moses Bwayo ont évoqué l'idée d'un tel documentaire.

Puis "nous avons réalisé que c'était une idée géniale parce que maintenant le monde peut voir la réalité de l'Ouganda", raconte-t-il. "C'est l'histoire de notre lutte pour la liberté et la démocratie en Ouganda, vue à travers mes yeux, ceux de ma femme, de ma famille et de ceux avec qui je travaille. (...) C'est l'histoire du peuple ougandais, non censurée".

"Je pleurais"

Le 23 janvier, il a appris la nomination du film au prix du "meilleur documentaire" des prestigieux Oscars, en pleine clandestinité. Il avait quitté secrètement quelques jours plus tôt son domicile, barré par les forces de sécurité avant une manifestation prévue de l'opposition, pour mener des actions avec ses sympathisants, narguant le pouvoir sur les réseaux sociaux.

"J'ai oublié (...) que j'étais caché, j'ai crié parce que je pensais que c'était une victoire suprême. Honnêtement, je ne m'y attendais pas", raconte-t-il. Sa femme Barbie l'avait rejoint : "Je pleurais, elle pleurait". Quelques jours plus tard, le 26 janvier, il organise une projection publique au siège du NUP, la seule qui ait jamais eu lieu en Ouganda.

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Le documentaire, présenté en avant-première au Festival de Venise 2022 puis acheté par National Geographic, est également accessible sur YouTube, où il cumule près de 210.000 vues depuis novembre.

Cette nomination lui a rappelé sa précédente carrière dans la musique, son "premier amour" avant d'entrer en politique en 2017. Mais aujourd'hui, "je ne peux pas jouer, ni même diffuser ma musique à la radio parce que je chante des chansons révolutionnaires qui agacent le général Museveni", déplore-t-il.

"Joindre les actes à la parole"

Un Oscar le mois prochain pourrait "changer la donne" pour l'Ouganda, estime-t-il. "Les Etats-Unis et l'Union européenne n'auront plus le luxe de prétendre qu'ils ne voient pas ce qui se passe en Ouganda. Ils devront joindre les actes à la parole", affirme-t-il, en appelant les pays occidentaux à cesser de soutenir le gouvernement de Museveni.

Les États-Unis ont déjà exprimé leur inquiétude sur la situation en Ouganda, par la voix notamment du Bureau des Affaires africaines du Département d'État qui soulignait en octobre que "l'espace démocratique est en train de se rétrécir" dans le pays.

Il faut faire davantage, estime Bobi Wine, en soulignant que si "l'Occident change sa politique (envers) l'Ouganda et cesse de soutenir la dictature et les massacres, (...) ce sera le début de notre libération". Avec le documentaire, "mon espoir, c'est que le monde appréciera la résilience du peuple ougandais, en particulier des jeunes qui refusent d'abandonner".

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