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Tensions au procès d'un journaliste accusé de "violences sexuelles" au Maroc


L'éditeur et journaliste marocain Taoufiq Bouachrine arrive au palais de justice accompagné de son avocat, à Casablanca, 5 avril 2018.
L'éditeur et journaliste marocain Taoufiq Bouachrine arrive au palais de justice accompagné de son avocat, à Casablanca, 5 avril 2018.

Le procès du directeur d'un quotidien marocain indépendant, Taoufiq Bouachrine, accusé de violences sexuelles, a repris dans une ambiance tendue, avec des débats marqués des questions sur le nombre exact de victimes et des protestations de la défense.

Connu pour sa liberté de ton, le journaliste de 49 ans qui dirige le journal arabophone Akhbar al-Yaoum a été arrêté le 23 février dans les locaux du quotidien, au cours d'une descente policière spectaculaire. Son procès s'est ouvert le 8 mars devant une cour de Casablanca (ouest).

L'affaire focalise depuis l'intérêt des médias marocains, avec des salves de réactions et des avis très partagés, du fait de la personnalité de l'accusé et de la gravité des charges.

Le directeur du quotidien doit en effet répondre de "traite d'êtres humains", "violences sexuelles", "abus de pouvoir à des fins sexuelles", "viol et tentative de viol" ou "attentat à la pudeur avec violence".

>> Lire aussi : Un journal marocain dénonce "espionnage" et "pressions" après l'arrestation de son patron

Taoufik Bouachrine conteste tout : il "ne veut pas démontrer son innocence mais faire éclater la vérité", a déclaré Idrissi Abdessamad, un de ses avocats pendant l'audience.

"Malgré plusieurs audiences, on ne sait pas très bien si les allégations formulées contre M. Bouachrine sont corroborées par un quelconque commencement de preuve", a de son côté déclaré Me Rodney Dixon, un avocat britannique choisi comme conseil par le journaliste.

Absent à l'audience de jeudi, l'avocat a dénoncé dans un communiqué "un simulacre" de procédure conduit "de façon injuste et abusive".

Les accusations reposent sur des vidéos saisies dans le bureau du directeur au moment de son arrestation. Et, selon le juge de la chambre criminelle de la cour d'appel de Casablanca, 15 femmes se sont portées "parties civiles".

Huit d'entre elles étaient absentes jeudi au tribunal. Parmi ces dernières, au moins trois ont déjà fait savoir qu'elles n'avaient rien à reprocher à l'accusé.


"Je refuse d'être instrumentalisée dans un règlement de compte politique. Je n'ai jamais été victime de harcèlement ni d'aucune agression sexuelle de la part de M. Bouachrine. Je n'ai jamais porté plainte contre lui", a ainsi déclaré à l'AFP l'une d'elle, Amal Houari, en marge du procès.

"Rien à voir"

Une autre assure n'avoir "rien à voir avec cette affaire". "J'ai bien expliqué aux enquêteurs qui m'interrogeaient que je ne reproche rien à Bouachrine et qu'il ne m'a jamais harcelée. Pourtant la cour d'appel m'a convoquée", a-t-elle dit à l'AFP.

Une troisième a également démenti avoir été victime de harcèlement et déposé plainte contre la police. Le parquet a décidé de la poursuivre pour "fausse déposition".

Au moins quatre des plaignantes maintiennent cependant leurs accusations. Le fait que certaines se désistent ne change rien à la "culpabilité" de l'accusé, a déclaré à l'AFP leur avocat Me Habib Haji.

Les plaintes pour viol sont rares au Maroc : les victimes redoutent les effets sur leur réputation dans une société qui reste largement conservatrice et craignent d'être elles-mêmes poursuivies, alors que les relations sexuelles hors mariage sont interdites.

Les avocats du directeur du quotidien ont déposé plusieurs plaintes pour contester la procédure de "flagrant délit", les "falsifications de procès verbaux" et la détention provisoire selon eux "arbitraire" de leur client.

Son épouse, Asma, a affirmé à l'AFP en marge du procès qu'il est détenu depuis trois semaines sans avoir vu de juge d'instruction car "c'est un journaliste qui défend la vérité".

Un journaliste indépendant qui avait dénoncé sur sa page Facebook le "piège tendu" à Taoufiq Bouachrine a été poursuivi pour "insulte à des institutions organisées".

Prochaine audience le jeudi 12 avril.

Avec AFP

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