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Les négociations suspendues après la mort de manifestants au Soudan


Manifestants à Khartoum au Soudan le 18 juillet 2019.
Manifestants à Khartoum au Soudan le 18 juillet 2019.

Les pourparlers prévus mardi au Soudan avec les généraux ont été suspendus, les négociateurs de la contestation civile ayant décidé de se rendre dans la ville où cinq lycéens ont été tués la veille lors d'une manifestation.

A Khartoum, des centaines de lycéens se sont rassemblés pour dénoncer la mort de leurs camarades tués à Al-Obeid (centre). "Tuer un étudiant, c'est tuer la nation", ont scandé ces jeunes manifestants, en uniforme scolaire, dans le quartier Burri, a constaté un journaliste de l'AFP.

Des jeunes Soudanais ont aussi manifesté dans d'autres quartiers de la capitale.

Les protestataires accusent les redoutés paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF), dirigées par le numéro deux du Conseil militaire à la tête du pays, Mohammed Hamdan Daglo, d'avoir ouvert le feu contre la foule dénonçant les pénuries de pain et de carburant à Al-Obeid.

"Tuer des civils pacifiques est un crime inacceptable qui ne doit pas rester impuni", a déclaré le chef du Conseil militaire de transition, le général Abdel Fattah al-Burhane.

Le Fonds des Nations unies pour l'Enfance (Unicef) a appelé mardi les autorités à "enquêter et traduire en justice tous les auteurs de violences contre des enfants", indiquant que les manifestants tués lundi à Al-Obeid avaient entre 15 et 17 ans.

Pays pauvre à l'économie exsangue, le Soudan est en proie à un mouvement de contestation depuis décembre. Déclenchées après le triplement du prix du pain, les manifestations se sont transformées en opposition au président Omar el-Béchir, destitué et arrêté par l'armée le 11 avril après 30 ans au pouvoir.

Elles se sont poursuivies pour réclamer un gouvernement civil aux militaires ayant pris le pouvoir.

- Négociations suspendues -

Après la mort des cinq lycéens, certains négociateurs du mouvement de contestation se sont rendus à Al-Obeid, d'où ils ont annoncé suspendre les pourparlers avec les généraux au pouvoir.

"Il n'y aura pas de négociations aujourd'hui car nous sommes toujours à Al-Obeid", a déclaré mardi à l'AFP un des négociateurs, Taha Osman, joint par téléphone. Satea al-Haj, un autre chef de la contestation également à Al-Obeid, a confirmé.

"Nous ne pouvons pas nous asseoir à la table des négociations avec ceux qui permettent de tuer des révolutionnaires", a aussi déclaré Siddig Youssef, l'un des meneurs de la contestation.

Les négociations devaient permettre de finaliser certains points en suspens après la conclusion d'un accord de partage du pouvoir le 17 juillet. Obtenu après de difficiles négociations, il prévoit un Conseil souverain composé de cinq militaires et six civils chargé de mener la transition pendant un peu plus de trois ans.

- Couvre-feu -

Depuis lundi, les autorités ont imposé un couvre-feu nocturne à Al-Obeid et dans trois autres localités du Kordofan-Nord, dont toutes les écoles ont reçu l'ordre de suspendre les cours.

L'Association des professionnels soudanais (SPA), fer de lance de la contestation, a appelé à de nouvelles manifestations dans tout le pays pour dénoncer ce "massacre".

Répondant à cet appel, des centaines de personnes se sont rassemblées dès lundi à Khartoum et à Omdourman, ville voisine.

"Les morts sont des enfants et cela ajoute à la brutalité", a dénoncé un dirigeant de la contestation, Ismail al-Taj, lors d'une manifestation dans la capitale.

"Les forces Janjawid et des tireurs d'élite ont tiré sans merci à balles réelles sur des écoliers", a accusé la SPA, en référence aux RSF, dont des hommes ont été recrutés parmi les Janjawid, milices accusées d'atrocités au Darfour (ouest).

Selon la SPA, plus de 60 personnes ont également été blessées.

Depuis décembre, la répression de la contestation a fait plus de 250 morts, dont 127 manifestants tués le 3 juin dans la dispersion brutale d'un sit-in organisé à Khartoum pour réclamer un pouvoir civil, selon un bilan d'un comité de médecins proche de la contestation.

Une enquête officielle a conclu samedi l'implication de huit paramilitaires --dont trois au moins sont membres des RSF-- dans le massacre du 3 juin. Mais selon cette enquête, seules 17 personnes ont été tuées le 3 juin, et 87 la semaine qui a suivi.

Depuis samedi, des manifestations ont lieu à Khartoum, pour protester contre les conclusions de cette enquête exonérant de toute responsabilité le Conseil militaire de toute responsabilité, qui a toujours affirmé ne pas avoir donné d'ordre pour la dispersion du sit-in.

Par ailleurs, le chef du Conseil militaire a annoncé lundi avoir renommé le redouté Service national de renseignement et de sécurité soudanais (NISS) --qui a mené la répression de la contestation-- en "Services des renseignements généraux".

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