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Le cacao du Cameroun intéresse les investisseurs étrangers


Concertation entre les investisseurs étrangers et les cacaoculteurs du village Tala 2, dans une plantation cacaoyère au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)
Concertation entre les investisseurs étrangers et les cacaoculteurs du village Tala 2, dans une plantation cacaoyère au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)

Pour accueillir la mission d'investisseurs hispano-belge dans le village camerounais Nkol-Abang, région du centre, à plus de 60 kilomètres de Yaoundé, les cacaoculteurs de la zone se sont fortement mobilisés.

Sous la conduite de leur superviseur, M Malla Tsimi Alexandre. Ce dernier travaille pour un projet visant à arrimer la production cacaoyère du Cameroun aux normes de qualité. Un programme initié par le ministère de l'agriculture et du développement rural.

" Nous avons un champ école dans ce village dans lequel, 20 à 30 personnes apprennent les bonnes pratiques agricoles", explique-t-il.

Exposant sa méthode de travail, M Malla ajoute qu'"à l'opposé, nous avons un champ dans lequel les pratiques agricoles d'antan sont en vigueur. Nous comparons les résultats techniques et économiques entre les deux champs".

Une méthodologie qui consiste "à convaincre les cacaoculteurs à adopter les méthodes modernes" dans la cacaoculture. Les résultats parlent d'eux-même "85% de réduction du taux de pourriture brune sont enregistrés sur les tiges de la parcelle créée par l'école paysanne", déclare le superviseur du programme face aux investisseurs.

Le Belge Michel Ruisse, l'espagnol David Monstserrat avec leur partenaire japonais inspectent un champ du cacao de qualité à Nkol-Abang au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)
Le Belge Michel Ruisse, l'espagnol David Monstserrat avec leur partenaire japonais inspectent un champ du cacao de qualité à Nkol-Abang au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)

La renommée sur la bonne qualité du cacao produit à Nkol-Abang et villages environnants a traversé les frontières nationales. Le village attire désormais les investisseurs étrangers.

"Nous achetons au moins 5000 tonnes de cacao du Cameroun depuis longtemps. Nous sommes dans ce village pour faire connaissance des planteurs et voir leurs pratiques agricoles, comment ils fermentent le cacao, comment ils font le séchage du cacao et surtout avoir une idée sur leur récolte et la qualité du cacao", raconte David Montserrat, responsable de vente d'une société de transformation du cacao en Espagne.

Une femme excelle dans l'école paysanne

La création de 34 écoles paysannes dans la zone a contribué à développer les bonnes pratiques agricoles dans plusieurs villages qui dépendent de l'arrondissement de Elig - Mfomo, département de la Lekié. Un département qui a une forte tradition de culture cacaoyère.

Les écoles paysannes ont aussi ouvert leurs portes aux femmes. Odile Nkoussa est une veuve qui y a fait ses classes. Sa plantation cacaoyère est présentée aujourd'hui comme un laboratoire de qualité dans son village Tala 2.

Odile Nkoussa, est une récipiendaire de l'école paysanne du village Tala 2 au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)
Odile Nkoussa, est une récipiendaire de l'école paysanne du village Tala 2 au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)

"C'est mon mari qui m'a laissé ce champ. Les tiges ont bien vieilli. En formation dans l'école paysanne, notre formateur nous a appris à rajeunir la cacaoyère", explique-t-elle, au terme de la visite de sa plantation par les investisseurs hispano-belges. En bonne élève, Odile étale ses connaissances acquises.

"Quand une tige de cacaoyer est déjà très vielle, elle fait sortir les gourmands. Il faut couper cette tige pour laisser ces gourmands grandir. Car, c'est ceux -ci qui deviendront plus tard les jeunes tiges. J'ai aussi fait la pépinière en prélevant les cabosses du cacaoyer. Je récolte plus d'une tonne par an", déclare-t-elle avec fierté.

Place au cacao de qualité au Cameroun

A l'horizon 2020, le Cameroun compte produire 600.000 tonnes de cacao sur l'ensemble du territoire national. Près de 800 écoles paysannes d'apprentissage de bonnes pratiques agricoles sont mises à contribution et assistent les cacaoculteurs. Objectif: changer la mauvaise réputation autour du cacao camerounais.

"La mauvaise réputation du cacao camerounais est telle qu'on lui colle des odeurs de fumée, de goudron et de fermentation", déplore André-Marie Acina Eloumba, coordonnateur national du programme d'appui à la gestion de la qualité de la production des filières café-cacao.

"On peut pourtant créer une crème de producteurs de cacao qui répond au standard international de qualité", pense-t-il.

Il suffit, selon lui, "de fédérer les 800 écoles paysannes réparties sur l'ensemble du territoire".

En raison de la couleur rouge brune du cacao camerounais, très prisée par certaines sociétés de transformation du cacao, le corrdonateur ne doute pas que "des partenaires ailles acheter notre cacao à bon prix".

Pour le moment, il reconnaît que, faute d'équipements adéquats, beaucoup de cacaoculteurs font face à de graves difficultés " au niveau de la chaîne qui va de la cueillette des cabosses jusqu'à la mise en sac".

Il promet dès cette année, sur financement du gouvernement camerounais, des dons d'équipements appropriés aux cacaoculteurs formés dans les écoles paysannes.

Bon cacao, mauvais prix des coxeurs.

Malgré leur participation à l'école paysanne et le cacao de qualité qu'ils produisent, ces cacaoculteurs ne se réjouissent pas du fruit de leur labeur au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)
Malgré leur participation à l'école paysanne et le cacao de qualité qu'ils produisent, ces cacaoculteurs ne se réjouissent pas du fruit de leur labeur au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)

Il reste que, le rapport qualité - prix du cacao ne suit toujours pas, ce qui plongent les cacaoculteurs de la zone dans le désarroi.

"Il y a des exportateurs de cacao qui travaillent avec les coxeurs. Ce sont eux qui achètent notre cacao à vil prix", décrie un jeune cacaoculteur.

"Lorsque le coxeur se présente devant toi, tu as cinq sacs de cacao et tes enfants doivent aller à l'école, tu n'as pas d'argent. Tu n'as pas d'autres choix à effectuer que de brader ton cacao pourtant il est de bonne qualité", s'alarme le second.

"Si j'avais une autre activité, j'aurai peut être déjà abandonné la cacaoculture", lance le troisième cacaoculteurs d'un village voisin de la localité de Nkol-Abang.

Pas de panique

La visite des investisseurs étrangers dans ces bassins de production de cacao de qualité visait justement à donner aux cacaoculteurs la conduite à tenir dans le contexte actuel où le prix du cacao est à la baisse sur le marché mondial.

Dr Narcisse Olinga, sous-directeur des échanges extérieurs au ministère du commerce au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)
Dr Narcisse Olinga, sous-directeur des échanges extérieurs au ministère du commerce au Cameroun, le 25 mai 2017. (VOA/Emmanuel Ntap)

Le représentant du ministère du commerce s'est voulu rassurant. "Vous serez rémunérés à un prix au delà de ceux qui ne font pas la qualité. C'est pour cela que nous sommes ici avec ces investisseurs, qui sont justement à la recherche de ce produit de bonne qualité", a annoncé aux planteurs Narcisse Olinga, sous-directeur des échanges extérieurs au ministère du commerce du Cameroun.

Avant d'ajouter, "ces investisseurs font dans le chocolat à partir d'un cacao qui a suivi les itinéraires qui vous sont enseignés dans les écoles paysannes. C'est une raison d'espérer et de continuer à produire du cacao de qualité".

Selon les statistiques de la balance commerciale , le cacao est le deuxième produit le plus exporté par le Cameroun, après le pétrole.

Emmanuel Jules Ntap, correspondant à Yaoundé

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