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De nouveaux affrontements font au moins 30 morts au PK5 de Bangui


Les résidents de PK5 à Bangui, le 11 avril 2018
Les résidents de PK5 à Bangui, le 11 avril 2018

De nouveaux affrontements meurtriers entre miliciens et commerçants mercredi et jeudi ont coûté la vie à au moins trente personnes au PK5, quartier majoritairement musulman de Bangui devenu l'une des zones les plus dangereuses de la capitale centrafricaine depuis 2014.

"33 corps ont été apportés à la mosquée", a affirmé à l'AFP Awad Al Karim, imam de la mosquée Ali Babolo, selon lequel les commerçants ont pris les armes pour s'opposer à la taxation imposée par les groupes d'autodéfense qui règnent dans le quartier.

Une source sécuritaire évoque au moins trente morts, sans plus de précision. De son côté, le président de la Croix-Rouge centrafricaine, Antoine Mbaobogo, établit un bilan qui "était de 23 morts à 16H00 et serait désormais de 33", affirmant qu'il "reste des corps près du marché".

Ni la Mission des Nations unies en Centrafrique (Minusca), ni les autorités centrafricaines ne contrôlent le PK5, et aucun bilan officiel des affrontements n'était disponible jeudi, la Minusca se contentant d'évoquer "des dizaines de victimes".

La rue principale du PK5, artère économique de Bangui, était désertée par les passants jeudi après-midi. De nombreuses boutiques ont été pillées, a constaté un journaliste de l'AFP.

"On en a marre! A chaque fois, (les miliciens nous) demandent de l'argent", peste un commerçant, propriétaire de plusieurs boutiques, qui demande à garder l'anonymat.

Comme plusieurs de ses confrères, il monte la garde dans la rue, armé d'une kalachnikov. Des explosions de grenades et des rafales d'armes automatiques étaient encore audibles dans l'après-midi, après avoir retenti dans la capitale centrafricaine dès mercredi soir.

La détermination des commerçants a pris les miliciens de court, eux qui s'étaient habitués à les "taxer" depuis qu'ils avaient pris le contrôle du quartier, en 2013.

"On veut faire un vrai travail", affirme désormais un jeune milicien de 19 ans. Il faisait jusqu'à présent le guet pour un des groupes armés du quartier mais déclare à présent vouloir se ranger, blâmant "les grands" de son groupe pour les violences.

"Nous avons dépêché sur place une force de réaction rapide" a indiqué Bili Aminou Alao, porte-parole de la Minusca. "Une partie du marché a été brûlée, ainsi que quelques véhicules", a-t-il ajouté.

- Quartier inaccessible -

"Entre 40 et 50 boutiques ont été brûlées, ainsi que quatre à cinq maisons" a précisé à l'AFP le colonel Patrick Bidilou Niabode, directeur général de la protection civile centrafricaine.

Les sapeurs-pompiers volontaires qu'il encadre ont réussi à éteindre deux feux jeudi qui se propageaient dans le marché, mais ont dû abandonner deux maisons aux flammes en raison des échanges de tirs nourris à proximité, selon le colonel Bidilou.

Le PK5 est en proie à des violences sporadiques depuis 2014. C'est dans ce quartier commerçant que s'étaient réfugiés beaucoup de musulmans de Bangui après les affrontements entre rebelles de la Séléka et groupes anti-balaka qui ont ravagé la capitale après la chute du président François Bozizé en 2013.

Depuis, les ruelles du PK5 sont tenues par une myriade de groupes autoproclamés d'autodéfense constitués depuis 2013.

En avril 2018, la Minusca avait lancé l'opération Sukula (Nettoyage en sängö, la langue nationale) pour arrêter un chef de milice. Cette opération répondait à un appel lancé par l'association des commerçants du PK5 qui avait fixé un ultimatum à la Minusca pour qu'elle démantèle ces groupes armés, accusés de violences, d'exactions et d'extorsions de fonds.

L'opération s'était soldée par un échec, avec une trentaine de morts et une centaine de blessés.

Riche en ressources naturelles, la Centrafrique est déchirée par la guerre, qui a forcé près d'un quart des 4,5 millions d'habitants à fuir leur domicile.

Un accord de paix a été signé à Bangui début février entre le gouvernement et quatorze groupes armés. Il est le huitième signé depuis le début de la crise mais la situation sécuritaire reste particulièrement fragile dans ce pays qui compte parmi les plus pauvres au monde.

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