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Brésil: Dilma Rousseff suspendue de la présidence par le Sénat


Dilma Rousseff vit ses dernières heures au pouvoir selon les observateurs.
Dilma Rousseff vit ses dernières heures au pouvoir selon les observateurs.

A 03H15 locales (06H15 GMT), 41 sénateurs sur un total de 81 s'étaient prononcés en faveur de la suspension du mandat de Mme Rousseff, accusée de maquillage des comptes publics.

La présidente du Brésil Dilma Rousseff a été suspendue jeudi de ses fonctions par le Sénat, qui va la soumettre à un procès en destitution pour maquillages des comptes publics.

Un total de 55 sénateurs sur 81 ont voté la mise en accusation de l'impopulaire dirigeante de gauche, et 22 contre. Elle sera remplacée dans la journée par son vice-président Michel Temer, qu'elle accuse de coup d'Etat institutionnel, en attendant le jugement final des sénateurs d'ici 6 mois.

La présidente brésilienne Dilma Rousseff s'apprêtait donc à céder le pouvoir à son vice-président Michel Temer, après l'ouverture de son procès en destitution par le Sénat attendue à l'aube, au terme d'une session marathon historique.

Les élus de la chambre haute continuait jeudi matin de s'exprimer à tour de rôle. Leur vote proprement dit devait intervenir dans les prochaines heures, au terme d'une longue session entamée mercredi matin.

Accusée de maquillage des comptes publics, Mme Rousseff, 68 ans, nie avoir commis une quelconque infraction et dénonce un "coup d'Etat" institutionnel.

Ironie de l'Histoire, l'ex-président Fernando Collor de Mello, qui avait démissionné en 1992 quelques jours avant sa destitution pour corruption, a participé aux débats en sa qualité de sénateur. Sans dévoiler quel serait son vote.

Le géant émergent d'Amérique latine va tourner la page de 13 ans de gouvernements du Parti des travailleurs (PT), ouverte en 2003 par l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva, qui a présidé au boom socio-économique brésilien des années 2000.

Première femme élue présidente du Brésil en 2010, Mme Rousseff, 68 ans, s'exprimera vers 10H00 (13H00 GMT) avant de quitter le palais du Planalto et de prendre un bain de foule avec ses partisans, selon le service de communication du PT interrogé par l'AFP.

Le PT a convoqué élus et militants devant le siège de la présidence à 08H30, sous le mot d'ordre "Nous n'acceptons pas un gouvernement illégitime".

"Ambiance d'enterrement"

Mme Rousseff, un ancienne guérillera torturée sous la dictature (1964-85) devait rejoindre ensuite sa résidence officielle de l'Alvorada, où elle continuera de vivre avec sa mère pendant la durée du procès.

Le futur président en exercice Michel Temer, 75 ans, s'adressera à la nation à 15H00 depuis la présidence, accompagné de son futur ministre des Finances Henrique Mereilles, selon le site d'information UOL.

Il devrait annoncer la formation d'une partie de son gouvernement, centré sur le redressement économique.

"Une ambiance d'enterrement" a régné mercredi à la présidence, où Mme Rousseff a fait emballer ses effets personnels, a confié un collaborateur à l'AFP, sous couvert d'anonymat.

"L'ambiance est très triste ici", a confirmé une femme travaillant au cabinet de Mme Rousseff. "Beaucoup d'entre nous cherchons un nouvel emploi. Nous ne voulons pas travailler pour le vice-président".

Par craintes d'échauffourées, les autorités avaient érigé des barrières métalliques devant le Sénat pour séparer les manifestants des deux camps. Lors d'un bref moment de tension, la police a tiré des gaz lacrymogènes sur des partisans de Mme Rousseff.

Mais l'immense Esplanade est restée pratiquement déserte.

L'opposition accuse la présidente d'avoir commis un "crime de responsabilité" en maquillant sciemment les comptes publics pour dissimuler l'ampleur des déficits en 2014, année de sa réélection disputée, et en 2015.

Mme Rousseff, ancienne guérillera torturée sous la dictature (1964-85), se défend en soulignant que tous ses prédécesseurs ont eu recours à ces "pédalages budgétaires" sans avoir été inquiétés.

Elle se dit victime d'un "coup d'Etat" institutionnel ourdi par Michel Temer, qui a précipité sa chute en poussant fin mars sa formation, le grand parti centriste PMDB, à claquer la porte de la majorité.

Mme Rousseff a exclu toute démission et se dit déterminée à "lutter par tous les moyens légaux et de combat" contre sa destitution.

Cocktail explosif

Le vote final des sénateurs pourrait intervenir en septembre, entre les jeux Olympiques de Rio de Janeiro (5-21 août) et les élections municipales d'octobre.

De l'avis des analystes, les chances de Mme Rousseff d'échapper à la destitution sont désormais très minces.

Le tout aussi impopulaire Michel Temer, crédité à peine 1% à 2% d'intentions de vote en cas d'élection, va donc probablement diriger le Brésil jusqu'à la fin du mandat en 2018.

Il va hériter du cocktail explosif qui a conduit droit dans le mur Mme Rousseff: la pire récession depuis les années 1930 et l'énorme scandale de corruption Petrobras, aux développements judiciaires imprévisibles, qui éclabousse son propre parti au plus haut niveau.

Il pourra compter dans un premier temps sur le soutien des milieux d'affaires qui espèrent un choc de confiance, et sur celui, prudent, des partis de droite qui ont oeuvré à la destitution de Mme Rousseff.

M. Temer prépare un paquet de mesures libérales et par nature impopulaires qui pourraient jeter les syndicats dans la rue: ajustement budgétaire sévère, réforme du système déficitaire des retraites et de la législation du travail.

Il "va hériter en grande partie de l'insatisfaction des Brésiliens contre la politique traditionnelle qu'il incarne", souligne Thiago Bottino, analyste à la Fondation Getulio Vargas.

Avec AFP

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