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Dix ans de prison pour les responsables du scandale financier ICC-Services


Presque neuf ans après les faits, le verdict est tombé dans la nuit devant un tribunal spécial, la Cour de répressions des infractions économiques et du terrorisme (Criet) à Porto Novo, capitale du Bénin.

La justice béninoise a condamné jeudi à dix ans de prison ferme les principaux responsables de l'affaire ICC-Services, baptisée "l'affaire Madoff béninoise", le plus gros scandale financier de ce pays d'Afrique de l'Ouest qui a touché plus de 150.000 personnes.

Le PDG d'ICC-Services Guy Aplogan, son directeur général Ludovic Dohou, ainsi que deux de leurs collaborateurs, Emile Tégbénou et Clément Sohounou, "sont condamnés à 10 ans de prison ferme et au paiement d'une amende de 12 millions de FCFA (18.2OO euros) chacun", a déclaré le président de la Criet, Cyriaque Dossa.

Ils ont été reconnus coupables d'escroquerie avec appel au public et exercice illégal d'activité bancaire, dans ce procès historique et très attendu des victimes de cette pyramide financière à la Ponzi qui s'est finalement écroulée, emportant avec elle leur argent.

La justice n'a toutefois pas retenu l'association de malfaiteurs qui aurait pu entraîner une peine plus lourde encore.

Parmi les six autres personnes inculpées dans cette affaire, certaines ont été acquittées, les autres ayant écopé de peines allant de trois à huit ans de prison.

Me Alain Orounla, un avocat des victimes, s'est dit "heureux de la décision du juge".

"La satisfaction des victimes, c'est qu'une décision de condamnation et de déclaration de culpabilité ait été prise", a-t-il affirmé.

Quelque 150.000 épargnants avaient été spoliés par 204 structures de placement entre 2006 et 2010, pour un total estimé à plus de 150 milliards de francs CFA (près de 230 millions d'euros), selon un rapport du Fonds monétaire international (FMI).

Connexions politiques?

La justice béninoise a tenté de comprendre comment fonctionnait cette escroquerie dont ICC-Services (Investment Consultancy and Computering Services), était la principale structure impliquée.

Des milliers d'artisans, commerçants ou encore magistrats ont perdu toutes leurs économies dans cette affaire, certains ayant même emprunté à des usuriers ou à des banques pour pouvoir investir.

ICC-Services promettait alors des rendements mirobolants à ses clients: jusqu'à 150, voire 200% par trimestre, avec remboursement du capital au bout d'un an.

La fraude consistait à rémunérer les premiers investisseurs avec l'argent déposé par de nouveaux clients, jusqu'à ce que le système s'effondre en 2010.

"Des consoeurs et des amis avaient fait des dépôts et recevaient les dividendes", a expliqué durant le procès une victime, Aline Aklassato, tisserande.

"Moi-même j'ai perçu mes dividendes pendant deux mois, soit 300.000 FCFA (457 euros), avant que les difficultés commencent".

Mais des zones d'ombre subsistent autour de cette affaire et des éventuelles connexions politiques qu'elle implique. Comment ces sociétés ont-elles pu prospérer toutes ces années? Ont-elles bénéficié de protections?

Dès 2010, le président du Bénin de l'époque, Thomas Boni Yayi, et plusieurs hauts responsables avaient été accusés de complicité. Aucun d'entre eux n'a été officiellement inquiété par la justice jusque-là.

Mais le parquet a assuré jeudi que le dossier n'était pas clos et que d'autres poursuites judiciaires suivraient.

Dédommagement

La plupart des victimes présentes au tribunal, comme Eric Justin Dénakpo, qui a assisté aux 32 journées d'audience, ont accueilli ce dénouement avec soulagement, eux qui se battent depuis des années pour obtenir réparation.

"Ce verdict donne l'espoir, même si on ne peut plus recouvrer l'intégralité de nos dus", a-t-il déclaré à l'AFP.

La justice a ordonné un premier dédommagement des victimes à hauteur de 827 millions de francs CFA (1,2 million d'euros), issus de la vente de meubles et biens des responsables d'ICC-Services lors de perquisitions effectuées quand le scandale a éclaté en 2010.

D'autres biens meubles et immobiliers - dont plus d'une centaines de maisons et parcelles - appartenant aux mis en cause "seront confisqués afin de constituer une cagnotte de dédommagement pour les victimes", a ajouté la Cour.

Après plus de huit ans passés en détention, la plupart des 10 responsables condamnés vont pouvoir être libérés, tandis que les quatre dirigeants condamnés aux peines les plus lourdes ont encore un peu moins de deux années à purger.

"La grande satisfaction, c'est que le procès ait eu lieu parce qu'on ne peut pas rester en prison sans connaître son sort", a confié à l'AFP l'un des avocats de la défense, Me Abou Salomon.

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