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La mélancolie des fans brésiliens à trois semaines du coup d'envoi du Mondial 2018


Neymar, au centre, et de gauche à droite Thiago Silva, Guillaume, Philippe Coutinho et Gabriel Jesus lors d'une séance d'entraînement de l'équipe nationale de football brésilienne pour le Mondial 2018, à Teresopolis, Rio de Janeiro, le 24 mai 2018.
Neymar, au centre, et de gauche à droite Thiago Silva, Guillaume, Philippe Coutinho et Gabriel Jesus lors d'une séance d'entraînement de l'équipe nationale de football brésilienne pour le Mondial 2018, à Teresopolis, Rio de Janeiro, le 24 mai 2018.

La Seleçao a beau figurer parmi les favoris pour rapporter un sixième titre de Russie, à trois semaines du Mondial, le cœur n'y est pas au pays du football.

Les vendeurs de souvenirs affirment que les affaires tournent au ralenti, les journaux ne parlent que de la santé de Neymar et le spectre de la déroute de l'édition précédente à domicile rôde.

Certes, selon une enquête réalisée par l'institut Parana, les Brésiliens se disent optimistes avant la compétition qui débute le 14 juin.

Deux tiers d'entre eux pensent que les auriverdes sont favoris pour soulever le trophée et 35% croient que Neymar sera désigné meilleur joueur de la compétition, plus nombreux que ceux qui sont persuadés que ce titre ira à Cristiano Ronaldo.

Le problème, toujours selon cette enquête, c'est que tout cela importe finalement bien peu pour les Brésiliens.

Deux tiers (66%) d'entre eux disent avoir peu ou pas d'intérêt pour la Coupe du monde et 14,5% ne savent même pas où elle aura lieu.

"Il n'y a pas le même niveau d'enthousiasme qu'avant", admet le chauffeur Serafim Fernandes, tandis qu'il déambule dans le très animé marché Saara de Rio, débordant d'articles de football.

Pour Fernandes, 62 ans, la crise économique a pris le dessus sur la passion du ballon rond. La première économie d'Amérique latine se relève à peine d'une récession historique, conjuguée à un scandale de corruption géant qui éclabousse la classe politique du pays. "Les gens souffrent", dit-il.

Il y a quatre ans, quand le pays de la samba a accueilli le Mondial, les murs et les rues du pays étaient repeints aux couleurs de la sélection, jaune canari et vert, un mois avant.

Certes, cet enthousiasme pouvait s'expliquer par le fait que la compétition se jouait à domicile, mais orner les rues est une vieille tradition au Brésil. A ce stade, l'absence de décorations interpelle.

- Trouble-fête -

A Rio de Janeiro, c'est l'un des hauts lieux du football depuis une quarantaine d'année qui est menacé: la rue Alzirao.

Cette artère du quartier populaire de Tijuca, à un kilomètre du stade Maracana, est traditionnellement la mieux décorée de Rio. A chaque match de la Seleçao, les Brésiliens y affluent par milliers pour suivre la prestation de leur équipe sur écran géant.

Cette année, après avoir perdu son sponsor, le géant de la bière Ambev, elle reste pour l'heure éteinte.

"Nous sommes en train de nous battre pour rendre cet événement possible malgré l'attitude décevante d'Ambev", ont fait savoir les organisateurs dans un communiqué.

Dans un des nombreux magasins de Rio spécialisés dans les produits liés au football brésilien, le vendeur Paulo Santos Silva confie avoir acheté avec "prudence" ceux faisant référence au Mondial.

"Avant, tu pouvais commander 5.000 maillots, en sachant qu'ils partiraient. A présent, tu risques de te retrouver avec des invendus, alors j'en achète 100 et je les vends, puis j'en rachète 100 autres. Si on gagne un match, j'en prends 200", explique-t-il à l'AFP.

Tout n'est pas à mettre sur le compte de la crise, juge M. Silva, 60 ans. Il y a aussi l'élimination "calamiteuse" de la Coupe du monde 2014 en demi-finales, après un humiliant 7-1 contre l'Allemagne.

"C'est gravé dans la mémoire des Brésiliens", assure-t-il, l'air meurtri.

Pour certains, le blues des supporters jaune canari à une signification beaucoup plus profonde.

L'homme politique Paulo Pimenta, marqué à gauche, explique que l'utilisation du maillot de la Seleçao par ceux qui manifestaient en 2015 et 2016 en faveur de la destitution de l'ex-présidente Dilma Rousseff a terni les couleurs brésiliennes.

"Les putchistes ont réussi à retirer aux Brésiliens la joie du football", a-t-il écrit sur Twitter. "Le maillot est devenu un symbole de honte".

Ledio Carmona, célèbre commentateur de SporTV, assure pourtant que les supporteurs brésiliens vont finir par se réveiller.

Une fois dans le feu de l'action en Russie, les Brésiliens crieront aussi fort que d'habitude, prédit-il.

Serafim Fernandes, qui négocie pour acheter un maillot dans le marché de Saara, est d'accord avec lui sur ce point. "On en a vraiment besoin (...) si la Seleçao gagne, les gens vont oublier le reste".

Avec AFP

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