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Procès de militants au Tchad : une relaxe et deux mises en délibéré


Les prisonniers montrant ces images pour prouver au ministre de la justice leur ras-le-bol à l'intérieur de la maison d'arrêt, à N'Djamena, Tchad, le 17 février 2017. (VOA/André Kodmadjingar)
Les prisonniers montrant ces images pour prouver au ministre de la justice leur ras-le-bol à l'intérieur de la maison d'arrêt, à N'Djamena, Tchad, le 17 février 2017. (VOA/André Kodmadjingar)

Le procès à N'Djamena de trois militants tchadiens arrêtés début avril et détenus arbitrairement pendant plusieurs jours a abouti à une mise en délibéré du jugement pour deux d'entre eux et à une relaxe pour le troisième.

Le procureur a requis cinq ans de prison ferme et le verdict du au tribunal de grande instance de la capitale est attendu le 4 mai pour Nadjo Kaina et Bertrand Solloh tandis que M. Dingamnayal Nely Versinis a été relaxé pour "infraction non constituée", ont déclaré Mes Guerimbaye Midaye et Frédéric Dainonet, contactés depuis Libreville.

Membres de la campagne internationale "Tournons la page" (TLP) et du mouvement citoyen tchadien Iyina ("on est fatigués"), MM. Kaina et Solloh ont été arrêtés les 6 et 15 avril, détenus sans charges puis inculpés mercredi de "trouble à l'ordre public et incitation à la révolte".

M. Versinis, président du Collectif tchadien contre la vie chère (CTVC), avait été interpellé le 12 avril et avait aussi appris mercredi les charges d'"usurpation des titres et escroqueries" retenues à son encontre.

Laurent Duarte, président de TLP, a réclamé la libération de MM. Kaina et Solloh, estimant que leur procès "était une intimidation claire; l'objectif est d'instaurer la peur et de dissuader toute expression libre".

Selon Maîtres Midaye et Dainonet, les militants ont déclaré au tribunal avoir subi des tortures lors de leur détention dans les locaux de l'Agence nationale de sécurité (ANS).

"Ils ont été enchaînés, ils ont eu des sacs de piment sur la tête, des jets d'eau à forte pression... ça ne laisse pas trop de traces mais vous voyez qu'ils ont le visage tuméfié", a dit Me Dainonet joint par téléphone.

"J'estime que ce n'est pas une justice", a déclaré Me Midaye, ajoutant qu'il avait "claqué la porte" du tribunal.

"L'ANS est une institution au-dessus de la loi et au-dessus de la justice tchadienne", a estimé pour sa part Dobian Assingar, président de la Ligue tchadienne des droits de l'homme, joint par l'AFP depuis Libreville.

Il dénonce une recrudescence des "enlèvements", des "disparitions" au Tchad "comme à l'époque d'Hissene Habré", l'ancien président condamné jeudi à la prison à vie par un tribunal spécial africain à Dakar.

"Une dégradation très forte des libertés" est palpable, selon lui, depuis la présidentielle du 10 avril 2016 aux résultats contestés et qui a abouti à la réélection d'Idriss Déby pour un cinquième mandat.

Nadjo Kaina et Bertrand Solloh ont été arrêtés quelques jours après avoir invité la population à exprimer son mécontentement face à la situation politique et économique lors d'une "une journée Iyina" le 10 avril, un an après la présidentielle.

M. Versinis avait appelé les commerçants d'un marché de N'Djamena à faire grève contre l'augmentation des frais de stand.

Le pays, producteur de pétrole, est en proie à une crise économique et sociale aggravée par l'effondrement des cours du brut.

Avec AFP

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