Faible mobilisation lors des élections au Liban

Hassan Nasrallah, leader du Hezbollah, Beyrouth, Liban, le 14 novembre 2013.

Le Liban a tenu dimanche ses premières élections législatives en près d'une décennie, un scrutin qui a peu mobilisé et ne devrait pas bouleverser la répartition du pouvoir entre les principaux partis en place.

Les bureaux de vote ont fermé à 19 heures (16 heures GMT) et sur les 3,7 millions d'électeurs, seuls 49,2% ont déposé leur bulletin dans l'urne, contre 54% en 2009, a indiqué dans la soirée le ministre de l'Intérieur, Nohad Machnouk.

Cette faible mobilisation a été enregistrée alors qu'une nouvelle loi électorale, basée sur la proportionnelle, a été adoptée l'an dernier et que près de 800.000 nouveaux électeurs étaient éligibles au vote. "Cette loi devait générer un taux de participation plus élevé qu'en 2009", a regretté M. Machnouk.

Mais "ni les électeurs ni les responsables de bureaux de vote ne sont encore familiers avec cette nouvelle loi, ce qui a largement ralenti le processus de vote", a-t-il ajouté.

Les opérations de dépouillement des voix ont commencé en début de soirée mais les résultats définitifs ne devraient pas être connus avant lundi.

De l'avis des experts, l'issue du scrutin ne réserve aucune surprise, et le Parlement (128 députés) devrait être dominé par les partis traditionnels, notamment le puissant Hezbollah chiite, un allié de la Syrie et de l'Iran.

"Le Hezbollah est bien parti pour avoir une grande influence dans le processus décisionnel mais cela va dépendre des alliances qu'il va tisser ou renouveler", affirme ainsi a l'AFP le politologue Karim el-Mufti.

Quant au Premier ministre sunnite Saad Hariri, soutenu par l'Arabie saoudite, son parti politique "pourrait perdre quelques sièges mais sa reconduction au poste de chef de gouvernement n'est pas menacée", ajoute l'analyste.

Enfin la société civile, représentée notamment par la coalition Koullouna Watani, "devrait remporter deux sièges dans la capitale", assure Wadih el-Asmar, l'un des coordinateurs de la coalition - une première dans l'histoire du pays.

Désenchantement

A quelques heures de la fermeture des bureaux de vote, le peu d'enthousiasme des électeurs a poussé le chef de l'Etat, Michel Aoun, ainsi que les principales forces politiques, à exhorter de nouveau les Libanais à voter massivement.

Le Hezbollah a même réclamé une prolongation de deux heures, qui n'a pas eu lieu. Toutefois, les "électeurs présents à l'intérieur ou dans les environs des bureaux" après 19H00 ont été autorisés à voter, selon le ministère de l'Intérieur, suscitant certaines critiques.

Avec une classe politique accusée de corruption et de népotisme, incapable de relancer une économie brinquebalante, une grande partie des 3,7 millions d'électeurs est touchée par le désenchantement.

Les dernières législatives au Liban remontent à 2009. Le Parlement a ensuite prorogé à trois reprises son mandat, invoquant notamment des risques pour la sécurité du pays liés au débordement de la guerre en Syrie, qui a fait rage depuis 2011.

Ces dernières années, le pays a connu des crises à répétition, évitant, souvent de justesse, l'engrenage de la violence malgré une situation géographique sensible, entre la Syrie en guerre et Israël.

Indépendamment de l'issue du scrutin, le Hezbollah, seule formation à ne pas avoir abandonné les armes après la guerre civile (1975-1990), devrait continuer à dominer la scène politique.

"Le nouveau Parlement ne sera pas une source de nuisance pour le Hezbollah. Il bénéficiera de l'absence d'une large coalition face à lui", confirme Imad Salamey, professeur de sciences politiques à l'Université libanaise américaine (LAU), à Beyrouth.

Quelque 597 candidats répartis en 77 listes étaient en lice, pour des législatives organisées pour la première fois selon un mode de scrutin proportionnel.

Mais la répartition des sièges est aussi régie par un subtil partage confessionnel, entre les différentes communautés religieuses, et respecte une parité islamo-chrétienne.

Incidents

Sur le terrain, plusieurs irrégularités et infractions ont toutefois été relevées par l'Association libanaise pour des élections démocratiques (LADE).

Elle évoque notamment l'usage de couteaux et de bâtons dans une violente bagarre à Zahlé (est), et le passage à tabac d'une candidate, dans un bureau de vote situé dans une localité du sud, par des partisans du Hezbollah.

L'association a également déploré l'autorisation de vote dans certains bureaux au-delà de 19H00 (16H00GMT), soulignant qu'il s'agit d'une "infraction a la loi".

Le Liban, qui accueille 1,5 million de réfugiés venus de la Syrie voisine, n'échappe pas aux répercussions du conflit.

Le Hezbollah intervient militairement au côté du régime syrien, et même si cet engagement divise la classe politique, les candidats se sont abstenus d'évoquer la délicate question de son arsenal militaire.

Les prochains élus devront se pencher sur des questions politiques, mais aussi économiques et environnementales, dans un pays habitué aux coupures d'électricité quotidiennes, aux pénuries d'eau et à une crise de gestion des déchets ménagers qui perdure depuis trois ans.
Avec AFP