Les autorités guinéennes interdisent les manifestations

Un policier regarde les manifestants après la publication des résultats préliminaires des élections à Conakry, le 23 octobre 2020.

Le gouvernement guinéen a annoncé l'interdiction de grandes manifestations politiques dans tout le pays jusqu'à nouvel ordre en invoquant le Covid-19, mais l'opposition a dénoncé une instrumentalisation de la pandémie pour faire taire les adversaires du président Alpha Condé.

L'interdiction, présentée comme un "rappel" par le gouvernement, est énoncée alors que le parti du principal adversaire de M. Condé à la récente présidentielle appelait à manifester mercredi.

"Le gouvernement rappelle aux partis politiques et mouvements alliés de la mouvance présidentielle, ainsi qu'à toutes les entités politiques et sociales, la suspension pour raison sanitaire des manifestations de masse sur toute l'étendue du territoire national", a dit le porte-parole du gouvernement Aboubacar Sylla dimanche soir sur la télévision nationale.

En un an de tensions causées par la candidature de M. Condé à un troisième mandat, les autorités ont à plusieurs reprises interdit des rassemblements de l'opposition. Elles ont argué du risque de trouble ou, depuis son apparition en mars, du coronavirus. Ces interdictions étaient jusqu'alors édictées au coup par coup.

Le porte-parole du gouvernement a parlé d'une "mesure exceptionnelle justifiée par l'état d'urgence" instauré officiellement pour combattre la pandémie.

Cette mesure "provisoire" sera levée quand des "progrès significatifs" auront été constatés contre le coronavirus, a-t-il dit.

L'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), parti du principal challenger de M. Condé à la présidentielle du 18 octobre, avait appelé à manifester mercredi contre ce qu'elle appelle un "hold-up" électoral et l'arrestation de plusieurs de ses leaders après l'élection.

"Nous condamnons fermement l’instrumentalisation et la politisation du Covid-19 pour protéger le hold-up électoral et les arrestations arbitraires", dit un de ses responsables, Joachim Baba Millimono, dans une déclaration.

La candidature d'Alpha Condé à un troisième mandat a donné lieu à des mois de manifestations durement réprimées et de violences qui ont fait des dizaines de morts civils depuis octobre 2019 et dans les jours suivant l'élection.

M. Condé, 82 ans, a été proclamé vainqueur par la Cour constitutionnelle. Cellou Dalein Diallo, chef de l'UFDG, assure que c'est lui qui a gagné et dénonce une fraude.

Human Rights Watch a déjà exprimé par le passé le soupçon que "le gouvernement instrumentalise la crise (sanitaire) comme excuse pour réprimer la dissidence et bafouer les droits humains".