Khartoum, la capitale de cinq millions d'habitants, est "survolée par les avions de combat" tandis que des tirs et des explosions résonnent dans différents quartiers, ont rapporté des témoins à l'AFP.
Les combats qui ont fait des centaines de morts ont éclaté le 15 avril entre les deux généraux aux commandes du pays depuis leur putsch de 2021, piégeant des millions de Soudanais.
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"L'échelle et la vitesse à laquelle se déroulent les événements au Soudan (sont) sans précédent", a estimé dimanche l'ONU, qui a dépêché dans la région son responsable pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.
"Je suis en route (...) afin d'étudier comment nous pouvons apporter une aide immédiate" aux habitants, a déclaré M. Griffiths, pour qui la "situation humanitaire atteint un point de rupture" dans le pays, l'un des plus pauvres du monde. Le pillage massif des bureaux et des entrepôts humanitaires a "épuisé la plupart de nos stocks", a-t-il dit.
Malgré tout, dans un pays où un tiers des habitants souffraient de la faim avant la guerre, le Programme alimentaire mondial (PAM) a annoncé "lever immédiatement la suspension de ses activités", ordonnée après la mort de trois de ses employés.
Le chef de l'armée, Abdel Fattah al-Burhane, et le patron des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti, avaient accepté de prolonger dimanche à minuit le cessez-le-feu de trois jours, après une "médiation des Etats-Unis et de l'Arabie saoudite", selon l'armée soudanaise.
Mais depuis le début du conflit, plusieurs trêves ont été annoncées avant d'être aussitôt violées. Selon les experts, elles signifient uniquement que les couloirs sécurisés pour les évacuations des étrangers sont maintenus et que les négociations, qui ont lieu à l'étranger, se poursuivent. Jusqu'ici, les deux généraux refusent des négociations directes.
Les combats ont fait 528 morts et 4.599 blessés, selon des chiffres officiels largement sous-évalués. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) est parvenu dimanche à faire atterrir à Port-Soudan, à 850 kilomètres à l'est de Khartoum, un premier avion chargé de huit tonnes d'aide. Cela ne soignera que "1.500 blessés", a-t-il prévenu.
L'ONU a recensé 75.000 personnes déplacées à l'intérieur du pays. Au moins 20.000 ont fui vers le Tchad, 6.000 vers la Centrafrique et des milliers d'autres vers le Soudan du Sud et l'Ethiopie. Au total, jusqu'à 270.000 personnes, selon une estimation de l'ONU, pourraient fuir les combats qui touchent 12 des 18 Etats de ce pays de 45 millions d'habitants.
"Situation intenable"
Les habitants de la capitale, quand ils ne fuient pas, restent barricadés, essayant de survivre malgré les pénuries de nourriture, d'eau et d'électricité. L'Etat de Khartoum a donné "congé jusqu'à nouvel ordre" aux fonctionnaires, tandis que la police assure se déployer pour prévenir les pillages.
La plupart des hôpitaux du pays sont hors service. Pour ceux fonctionnant encore, "la situation est intenable" car le matériel manque, a affirmé à l'AFP Majzoub Saad Ibrahim, médecin à Ad-Damir, au nord de Khartoum.
Plusieurs pays, dont la France, l'Allemagne et les Etats-Unis, ont évacué leurs ressortissants et d'autres étrangers. Le Canada a mis fin à ses évacuations "en raison des conditions dangereuses". La Ligue arabe se réunit lundi au Caire pour discuter de la situation au Soudan, après que les Emirats arabes unis, alliés du général Daglo selon les experts, ont annoncé avoir appelé le chef de l'armée.
Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Fayçal ben Farhane, avait reçu dimanche un émissaire du général Burhane. En outre, Ryad a réclamé une réunion mercredi de l'Organisation de la coopération islamique.
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Pour le Carnegie Middle East Center, le général Daglo cherche à gagner du temps car "plus il pourra tenir longtemps ses positions à Khartoum, plus grand sera son poids à la table des négociations."
"Tribus armées"
Selon l'ONU, une centaine de personnes ont été tuées au Darfour-Ouest, une région marquée par la sanglante guerre civile déclenchée en 2003 entre la dictature d'Omar el-Béchir et des minorités ethniques. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a mis en garde contre une situation "terrible", avec "des tribus qui essaient désormais de s'armer". Alors que le drame humanitaire s'aggrave, l'ONG Médecins sans frontières (MSF) a arrêté "la quasi-totalité de (ses) activités" à cause des violences.
A la tête des miliciens Janjawid, le général Daglo avait mené la politique de la terre brûlée au Darfour sur ordre de Béchir. La guerre a fait environ 300.000 morts et près de 2,5 millions de déplacés, selon l'ONU. Les Janjawid ont officiellement donné naissance en 2013 aux FSR, supplétifs paramilitaires de l'armée.
Les généraux Burhane et Daglo avaient fait front commun lors du putsch de 2021 pour évincer les civils avec lesquels ils partageaient le pouvoir depuis la chute de Béchir en 2019. Mais des divergences sont ensuite apparues et, faute d'accord sur l'intégration des FSR dans l'armée, ont dégénéré en guerre ouverte.