Impatients et anxieux, les Gabonais attendent les résultats de la présidentielle

Les affiches de la campagne électorale du président gabonais sortant Ali Bongo et de son rival Jean Ping de l’opposition, sont côte-à-côte, à Libreville, 26 août 2016. VOA/Idriss Fall

Les Gabonais attendaient dimanche avec impatience et anxiété les résultats de la présidentielle de samedi opposant le président sortant Ali Bongo Ondimba et Jean Ping, un ancien cacique du régime du défunt Omar Bongo, les deux camps se disant vainqueurs et s'accusant mutuellement de fraudes.

Sous un ciel chargé et une bruine annonciateurs de l'arrivée de la saison des pluies, les rues de Libreville étaient quasi-désertes dimanche matin, après une nuit sans incident signalé. Aucune force de police n'était visible dans la capitale.

Les fidèles se rendaient aux offices dominicaux, mais moins nombreux que d'ordinaire. Certains religieux ont en effet décidé de réduire la durée des offices, ou carrément de les annuler.

C'est le cas du pasteur Fernand Mabika, qui dirige une église de réveil dans le quartier Beau Séjour. Il a pris cette décision rarissime pour des "raisons de sécurité", craignant des débordements en ville après le scrutin présidentiel de la veille. Son confrère Pascal Anguillet, qui officie au quartier Cité Médecins, a réduit la durée de l'office pour les mêmes raisons.

Librevillois cloîtrés

Beaucoup de Librevillois restaient cloîtrés chez eux, après avoir fait des stocks de nourriture - riz, conserves,... - les jours précédant l'élection, anticipant des violences post-électorales.

Les commerçants adoptent eux-aussi la même ligne de conduite. Redoutant des pillages, beaucoup - y compris les petites épiceries de quartier généralement tenues par des Ouest-Africains - ont baissé le rideau.

"Il n'y a pas de +bruit+ (ndlr: désordre) pour l'instant au quartier mais on attend vite les résultats", explique à l'AFP Honoré, gardien d'immeuble. "On verra quelle décision ils (les candidats) prendront", ajoute-t-il, en espérant que "ça ne sera pas comme la dernière fois".

Allusion à la présidentielle de 2009 où la victoire d'Ali Bongo Ondimba, après le décès de son père Omar qui avait dirigé le Gabon pendant 41 ans, avait été contestée par l'opposition, entraînant des violences meurtrières, notamment à Port-Gentil, le poumon pétrolier du pays, et l'instauration du couvre-feu.

Après une campagne délétère, le scrutin s'est finalement déroulé dans le calme et les électeurs ont voté en nombre, à Libreville et en province.

Mais dès avant même la fermeture des bureaux de vote, les deux camps se sont accusés mutuellement de frauder, comme à chaque élection présidentielle depuis le rétablissement du pluralisme politique en 1990.

Affirmations contradictoires

"Nous avons noté des fraudes massives en particulier dans les zones où les représentants de l'opposition ont pu arriver dans les bureaux de vote en premier", a accusé dimanche le porte-parole d'Ali Bongo Alain-Claude Bilie-By-Nze.

"En face, nous savons qu'ils préparent la triche", avait lancé auparavant M. Ping.

Et dans la nuit, les deux camps ont aussi affirmé avoir gagné, malgré les avertissements du ministre de l'Intérieur qu'aucun résultat autre que ceux collectés et vérifiés par la Commission électorale (Cénap) et validés par son ministère n'avait de valeur. Les résultats sont attendus dans un délai de 72 heures après la clôture du scrutin.

"Nous sommes en mesure d'affirmer que notre candidat, Ali Bongo Ondimba, emportera la victoire (...) Nous sommes déjà en route pour un second mandat", a affirmé en fin de soirée M. Bilie-By-Nze, reconnaissant "qu'aucun chiffre ne peut et ne doit être avancé à ce stade".

Dimanche matin, Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, qui coordonne la campagne de M. Ping a lui avancé devant la presse de nouveaux chiffres en faveur de son candidat qui obtient selon lui 60% des suffrages contre 38% à Ali Bongo, dans des bureaux représentant 48% des électeurs isncrits.

Il a également accusé le président sortant de préparer "une tentative de passage en force" avec l'appui de l'armée.

"C'est totalement farfelu", a aussitôt répliqué Alin-Claude Bilie-By-Nze: "c'est serré, mais nous avons une avance".

Un millier d'observateurs internationaux et nationaux ont supervisé le scrutin. Ceux de l'Union européenne (UE) - dont le rapport préliminaire est attendu lundi - et de l'Union africaine (UA) n'ont fait état d'aucun incident pendant la journée de vote.

Avec AFP