Onze personnes tuées dans un attentat-suicide portant la marque de Boko Haram au Cameroun

Kolofata, Cameroun, le 16 mars 2016.

Un nouvel attentat-suicide portant la marque des islamistes nigérians de Boko Haram a fait onze morts dans la nuit de mercredi à jeudi au Cameroun, démontrant que le groupe garde la capacité de mener des opérations meurtrières même s'il a été affaibli par une série d'offensives des armées de la région.


Cette attaque porte à 480 le nombre de victimes civiles dues à Boko Haram dans le nord du Cameroun en un an, a indiqué Amnesty International.

"Un kamikaze de Boko Haram s'est fait exploser dans la nuit à Djakana", localité de la région de l'Extrême-Nord, à la frontière du Nigeria, a indiqué à l'AFP une source sécuritaire s'exprimant sous couvert d'anonymat.

"Le bilan actuel de cet attentat est de 11 morts, 4 blessés", a ajouté à l'AFP le gouverneur de la région, Midjiyawa Bakari, précisant que les blessés avaient été évacués sur deux hôpitaux de la région.

Selon la source sécuritaire, la plupart des victimes étaient des membres d'un comité de vigilance chargé de traquer les combattants de Boko Haram, groupe qui a rallié l'organisation de l'Etat islamique, et de prévenir les forces de sécurité en cas d'infiltration de jihadistes.

"Ils étaient rassemblés dans une salle vidéo lorsqu'un kamikaze s'est infiltré et a actionné sa charge explosive", selon cette source.

Le gouverneur a mis en cause "l'imprudence des jeunes qui tiennent le vidéo club. Alors que les activités sont interdites, ils prennent le risque de diffuser des films dans la nuit à l'aide d'un groupe électrogène dans une brousse".

"Il règne une certaine accalmie dans la région, mais nous demandons aux populations d'attendre que nous leur donnions l'accord pour la reprise des activités, surtout au niveau de la ligne de front", a ajouté le gouverneur.

"De juillet 2015 à juillet 2016, Boko Haram a mené au moins 200 attaques, dont près de 40 attentats-suicides dans le grand nord du Cameroun, avec au moins 480 victimes", a rapporté jeudi Amnesty International dans un communiqué de presse.

Les responsables de ces attaques "devraient être traduits en justice dans des procès équitables sans être passibles de la peine de mort", ajoute l'ONG. Au total 89 membres de Boko Haram ont été condamnés à mort pour "terrorisme" en un an, avait indiqué en mars la justice camerounaise.

Ces dernières semaines, aucun attentat-suicide n'avait été enregistré dans cette région frontalière de la zone d'influence de Boko Haram au Nigeria.

Les islamistes utilisent régulièrement des femmes et filles comme kamikazés, au Nigeria, au Cameroun, au Tchad et au Niger. Ils visent fréquemment des mosquées, des marchés populaires, des gares routières et des postes de contrôle.

Plusieurs attaques ont également visé des camps de personnes déplacées par le conflit qui dure depuis 2009 et qui a fait 20.000 morts et 2,3 millions de réfugiés.

Offensive en préparation

Mais le groupe a subi d'importants revers ces derniers mois à la suite d'une série d'offensives des armées de la région et a perdu la quasi-totalité des localités dont il s'était emparé dans le nord-est du Nigeria.

"Cette menace n'est pas éradiquée, mais diminuée et Boko Haram a une capacité de nuisance", a souligné mercredi le général Patrick Brethous, commandant de l'opération française Barkhane de lutte contre les groupes jihadistes au Sahel, dont l'état-major est installé à N'Djamena, au Tchad.

"Boko Haram n'est plus capable de frapper N'Djamena" et "ne va plus dans les grandes villes", a-t-il ajouté à la télévision nigérienne, à l'issue d'un entretien avec le président nigérien Mahamadou Issoufou.

Toutefois "Boko Haram est encore présent dans l'Etat de Borno", dans le nord-est du Nigeria, notamment dans "l'un de ses deux refuges" situé "dans la région du lac Tchad", a-t-il mis en garde.

"Des opérations" menées respectivement "par les Nigérians" dans le sud-est de l'Etat du Borno et la Force multinationale mixte autour du lac Tchad "sont en cours", a-t-il précisé.

Une autre "contre-offensive" est en préparation dans la zone, a-t-il indiqué. "Il faut poursuivre les opérations de manière coordonnée au sein de la force multinationale mixte et avec l'appui aussi de certains pays occidentaux comme les Etats-Unis, la France ou le Royaume-Uni", selon le général.

Lors d'une visite en France, mi-juin, le président Issoufou a souhaité que l'opération Barkhane puisse aussi s'occuper de Boko Haram qui a mené début juin une attaque massive contre la ville nigérienne de Bosso.

Avec AFP