Burundi : l'ancien président Buyoya met en garde contre "un risque de génocide"

L'ex présidente irlandaise Mary Robinson (g.) et l'ex-président burundais Pierre Buyoya avec sa femme Sophie, à Kigali, le 7 avril 2014. (REUTERS/Noor Khamis)

"Il y a risque de génocide bien sûr. Je me demande d'ailleurs s'il n'y a pas déjà des éléments de génocide quand on voit le niveau atteint par les violences aujourd'hui", a déclaré l'ex-président burundais vendredi à RFI.

L'ancien président burundais Pierre Buyoya a mis en garde contre "un risque de génocide" au Burundi et dénoncé la volonté des dirigeants actuels du pays d'ethniciser la crise, dans un entretien vendredi 18 décembre sur Radio France internationale (RFI).

"Il y a risque de génocide bien sûr. Je me demande d'ailleurs s'il n'y a pas déjà des éléments de génocide quand on voit le niveau atteint par les violences aujourd'hui", a déclaré M. Buyoya, qui dirigea le pays de 1987 à 1993, puis de 1996 à 2003.

Interrogé sur une volonté d'ethniciser la crise de la part du régime du président Pierre Nkurunziza, M. Buyoya a répondu : "c'est clair !".

"Il suffit de lire le discours politique qu'il y a sur la place publique, et malheureusement de la part de hauts responsables", a-t-il souligné.

"Il y a les faits, les expressions au quotidien, ce qui se dit en cachette fini par être connu. Et vraiment on a l'impression que dans certains milieux il y a une volonté d'utilisation de la crise", a ajouté l'ancien chef de l'Etat, dont les prises de positions publiques sur son pays sont très rares.

"Discours souterrain"

"Ce sont des mots qui sont adressés à des responsables politiques, parfois en cachette, mais ça finit par se savoir, c'est le discours souterrain qui soutient toute cette violence", a-t-il observé, rappelant qu'"on a eu dernièrement un discours du président du sénat qui a fait le tour du monde, un discours très dangereux".

"Des confrontations ethniques ont eu lieu depuis longtemps, depuis des décennies entre les deux communautés hutu et tutsi. C'est ce que nous avons essayé d'exorciser au Burundi. On pensait avoir fait des progrès, malheureusement on a l'impression qu'on retourne à la case départ", a déploré M. Buyoya.

"Quand il y a risque de génocide, quand il y a risque de tueries massives, il faut pouvoir protéger la population", a-t-il ajouté, se disant "pas du tout choqué" si des Casques bleus étaient envoyés sur place avec "l'objectif de faire en sorte qu'aucun Burundais ne continue à mourir".

"Il faut arrêter cette hémorragie et revenir à la table des négociations. (...) Le président Pierre Nkurunziza ne doit pas refuser le dialogue", a jugé M. Buyoya.

"Nous sommes arrivés à un moment où il est impossible de se taire et où le pays peut basculer dans l'irréparable", a-t-il mis en garde.

Avec AFP