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Sévère charge américaine contre les atteintes à la liberté d'expression en Turquie


Le vice-président américain Joe Biden a dénoncé les atteintes à la liberté d'expression en Turquie en reprochant sèchement au régime islamo-conservateur du président Recep Tayyip Erdogan de ne pas montrer "l'exemple" sur ce front.

Le vice-président américain Joe Biden a dénoncé vendredi les atteintes à la liberté d'expression en Turquie en reprochant sèchement au régime islamo-conservateur du président Recep Tayyip Erdogan de ne pas montrer "l'exemple" sur ce front.

Au premier jour d'une visite à Istanbul, M. Biden a profité d'une rencontre avec un groupe d'intellectuels et de journalistes proches de l'opposition pour ajouter sa voix à ceux qui, en Turquie comme dans les capitales étrangères, s'inquiètent d'une dérive autoritaire de l'homme fort du pays.

"Quand les médias sont intimidés ou les journalistes emprisonnés pour des publications critiques (...) et que plus de 1.000 universitaires sont accusés de trahison simplement pour signer une pétition, ce n'est pas un bon exemple à donner", a-t-il lancé.

"Nous voulons que la Turquie montre un exemple fort, pour toute la région, de ce que signifie une démocratie active", a-t-il insisté.

Entre autres reproches, le vice-président américain a critiqué les poursuites engagées contre un gros millier d'intellectuels turcs qui ont signé la semaine dernière une pétition dénonçant des "massacres" commis par l'armée contre les civils pendant ses opérations contre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le sud-est du pays.

Ce texte a rendu furieux M. Erdogan, qui ne rate plus une occasion de menacer les pétitionnaires, à qui il a promis de "payer le prix" de leur "trahison".

Vendredi encore, il a saisi le prétexte de l'explosion, attribuée au PKK, d'un engin dans une cour d'école de Diyarbakir, la grande ville à majorité kurde de Turquie, pour étriller ces "soi-disant universitaires".

"Ils se sont rangés du côté de ceux qui ont lancé cette attaque odieuse contre des écoliers", a lancé M. Erdogan devant la presse.

Des poursuites judiciaires ont été lancées contre ces intellectuels, notamment pour "propagande terroriste", "insulte aux institutions et à la République turque".

- Journalistes emprisonnés -

Une vingtaine d'entre eux ont été brièvement placés en garde à vue, suscitant un vif émoi en Turquie comme à l'étranger. Bruxelles, qui essaie d'obtenir d'Ankara sa coopération dans la crise des migrants, a notamment dénoncé un "climat d'intimidation" jugé "extrêmement préoccupant".

"Si vous n'avez pas la possibilité d'exprimer votre opinion et de critiquer une politique, d'offrir une alternative sans craindre l'intimidation et la punition, alors votre pays est privé d'opportunités", a renchéri le vice-président américain vendredi.

M. Biden s'est aussi ému de la détention de deux journalistes du quotidien Cumhuriyet, bête noire du régime turc, écroués depuis près de deux mois pour "espionnage".

La justice turque reproche à Can Dündar et Erdem Gül d'avoir diffusé une vidéo de l'interception, en janvier 2014 à la frontière syrienne, de camions appartenant aux services secrets turcs (MIT) et transportant des armes destinées à des rebelles islamistes syriens. M. Erdogan avait là aussi dénoncé une "trahison".

M. Biden s'est entretenu avec l'épouse et le fils de M. Dündar. "Il m'a dit que j'avais un père très courageux et que je devais en être fier", a déclaré le fils, Ege Dündar, à l'issue de la rencontre, cité par l'agence de presse Cihan.

La Turquie pointe à la 149e place, sur 180, au classement mondial de la liberté de la presse publié par RSF, juste devant la Russie (152e).

Le vice-président américain doit rencontrer samedi M. Erdogan et son Premier ministre Ahmet Davutoglu pour des entretiens largement consacrés à la lutte contre le groupe Etat islamique (EI) et la guerre en Syrie.

La Turquie a longtemps été accusée de complaisance pour les rebelles radicaux en guerre contre le régime de Damas. En 2014, M. Biden, déjà, avait publiquement suggéré qu'Ankara armait ces groupe. M. Erdogan avait vivement réagi et obtenu ses excuses.

Le gouvernement turc a rejoint l'été dernier la coalition antijihadiste. Mais le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter a toutefois estimé jeudi qu'elle pouvait "faire davantage" pour lutter contre les combattants de l'EI.

Vendredi, M. Biden s'est recueilli sur le site de l'attentat suicide, attribué par Ankara aux jihadistes, qui a tué 10 touristes allemands à Istanbul.

Avec AFP

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