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Des hôpitaux kenyans retiennent de force des patients incapables de payer


Les milieux hospitaliers redoutent de ne pouvoir continuer à fonctionner si les patients refusent de payer
Les milieux hospitaliers redoutent de ne pouvoir continuer à fonctionner si les patients refusent de payer
Au Kenya, le Centre pour les droits reproductifs a porté plainte contre le gouvernement, au nom de deux femmes détenues dans la maternité d’un hôpital pendant des semaines après avoir été incapables de payer leurs factures médicales. Mais l’hôpital fait valoir qu’il ne peut pas se permettre de soigner tout le monde gratuitement.
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Maimouna Awour s’est rendue à l'hôpital Pumwani dans le quartier de Majengo à Nairobi il y a deux ans à accoucher de son cinquième enfant. Après la naissance, quand elle a été prête à partir, elle a découvert qu'elle n'avait pas assez d'argent pour régler sa note. Elle possédait seulement 1.000 shillings (environ 12 dollars américains) alors qu’on lui demandait 3.000 shillings, soit près de 35 dollars.

On l’a faite déménager vers une section de l’hôpital où se trouvaient d’autres patients qui ne pouvaient pas payer leur notre, où elle est restée contre son gré pendant 20 jours.

« Ils nous ont traités comme des prisonniers, c'était comme s’ils nous intimidaient, abusaient de nous, nous disant d'aller chercher de l'argent, sinon pas moyen de sortir. Vous êtes là en prison assis, à ne rien faire. Vous ne pouvez rien faire, vous ne pouvez pas vous laver, ils ne peuvent pas vous soigner, vous êtes juste assis là » explique Mme Awour.

Elle a pu éventuellement s’en tirer lorsqu’un ami a convaincu l’ancien maire de Nairobi, qui visitait l’hôpital, de l’aider à payer sa note de frais qui avait augmenté à 12.000 shillings, soit 140 dollars.

Par la suite, le Centre pour les droits reproductifs a porté plainte contre le gouvernement. Il réclame des dommages et intérêts pour les souffrances psychologiques éprouvées par Mme Awour et une autre femme, et appelle les autorités à interdire la détention des patients incapables de payer les soins reçus.

Selon maître Judy Okal du Centre pour les droits reproductifs, de telles pratiques violent la nouvelle constitution, y compris l’Article 43 qui garantit le droit aux soins de santé. « Si vous ne versez pas d’acompte, vous êtes laissée sans surveillance pendant une longue période. Alors cela signifie, évidemment, que les patientes ne sont pas en mesure d'obtenir le plus haut niveau possible de soins de santé requis en vertu de la Constitution » explique Maitre Okal.

A l’intérieur de l’hôpital Pumwani, une dizaine de femmes se reposent sur des lits, dans le dortoir alloué à celles qui ne peuvent pas payer leurs factures. On les soigne quand même, dans l’attente que leurs familles puissent régler leurs dettes, disent-elles. Selon le Dr Lazarus Omandi, l’hôpital dispose de tout un processus pour les aider à se tirer d’affaire.

« Nous avons une assistante sociale qui étudie les cas de mères vraiment pauvres qui ne peuvent pas payer et elle enquête sur le milieu familial ; si vous ne pouvez vraiment pas payer, nous renonçons à recouvrer ces frais. Mais le processus prend environ une semaine » explique le Dr. Omondi.

Tel est le cas en moyenne pour une vingtaine de femmes chaque mois, et ce grâce à l’aide de personnes bienveillantes et d’ONGs. Mais Mme Awour, qui a été retenue pendant 20 jours, affirme n’avoir rencontré l’assistante sociale qu’à une seule reprise, pour se faire dire qu’elle devait se débrouiller pour trouver de l’argent.

Il faut avouer, affirme le Dr Omondi, que dans certains cas, des femmes essaient de voler l’hôpital en déclarant qu’elles n’ont pas un sou. Chaque patient doit verser quelque chose, ajoute-t-il. C’est la responsabilité de l’hôpital de s’assurer que vous avez versé ce que vous pouvez payer.

Ce n’est pas une excuse, rétorque Mme Awour, qui affirme que ses droits ont été violés. On abuse toujours le plus des pauvres, ajoute-t-elle. Elle espère que la plainte portée en son nom aidera d’autres femmes dans le même cas.
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