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Rwanda : référendum sur un maintien au pouvoir du président Kagame


Paul Kagame salue la foule à Kinigi, dans le nord du Rwanda, le 5 septembre 2015. (AP Photo/Ben Curtis, File)
Paul Kagame salue la foule à Kinigi, dans le nord du Rwanda, le 5 septembre 2015. (AP Photo/Ben Curtis, File)

Les quelque 37 000 Rwandais de la diaspora inscrits sur les listes électorales votaient dès jeudi dans les représentations diplomatiques. Le vote sur le territoire rwandais aura lieu vendredi.

Quelque 6,4 millions de Rwandais sont appelés aux urnes vendredi 18 décembre pour un référendum devant ratifier une révision constitutionnelle, dont la principale disposition autorise le président Paul Kagame à briguer un nouveau mandat et à potentiellement diriger le pays jusqu'en 2034.

Ils répondront par "oui" ou "non" à la question : "Êtes-vous d'accord avec la Constitution de la République du Rwanda telle que révisée pendant l'année 2015 ?"

Les quelque 37 000 Rwandais de la diaspora inscrits sur les listes électorales votaient dès jeudi dans les représentations diplomatiques. Ils étaient invités à cocher "Yego" ou "Oya" ("Oui" ou "Non" en kinyarwanda) sur un bulletin unique.

Il fait peu de doute que le oui l'emportera largement, la révision ayant été présentée comme une initiative populaire par les autorités qui mettent en avant les 3,7 millions de Rwandais ayant demandé par pétitions un maintien au pouvoir de Paul Kagame après l'expiration en 2017 de son mandat, le dernier que lui permet l'actuelle Constitution.

La révision est soutenue par la quasi-totalité des partis politiques homologués au Rwanda, à l'exception du seul petit Parti démocratique vert qui a toutefois renoncé à faire campagne pour le "Non", estimant trop court le délai de 10 jours entre l'annonce du référendum et le vote.

17 ans supplémentaires

Elu en 2003 et réélu en 2010, avec plus de 90 % des voix à chaque fois, M. Kagame est l'homme fort du pays depuis juillet 1994, quand sa rébellion du FPR a chassé de Kigali les extrémistes hutu et mis fin au génocide qu'ils avaient déclenché trois mois auparavant et qui a fait quelque 800 000 morts, essentiellement membres de la minorité tutsi.

Divers articles de la Constitution de 2003 ont été modifiés en novembre par le Parlement, mais les changements cruciaux sont les nouveaux articles 101 et 172 qui autorisent potentiellement M. Kagame, 58 ans, à se maintenir au pouvoir 17 ans supplémentaires.

Le nouvel article 101 continue de limiter à deux le nombre de mandats présidentiels, tout en abaissant sa durée de sept à cinq ans. Mais parallèlement, un nouvel article 172 instaure au préalable un nouveau septennat transitoire, entre 2017 et 2024, précisant que le président sortant y sera éligible, de même qu'aux deux quinquennats suivants.

Si l'essence de ces deux nouveaux articles-clés a été publiée par la presse pro-gouvernementale, le texte de la Constitution révisée n'a pas été rendu public et ni les électeurs ni les médias n'en ont pris connaissance. Ces derniers jours, des parlementaires ont toutefois arpenté le pays pour "expliquer" la révision et la NEC a indiqué avoir distribué dans le pays des documents résumant les modifications.

"Nous n'avons pas vu le texte physique"

"A part ce qu'on a vu dans les médias, nous n'avons pas vu le texte physique sur lequel on vote", a admis un étudiant rwandais venu déposer son bulletin à Kampala, en Ouganda, et souhaitant garder l'anonymat pour "raisons de sécurité".

Globalement jeudi, les électeurs de la diaspora admettaient ne pas connaître les détails de la révision et se prononcer sur le seul véritable enjeu de ce référendum : oui ou non à un maintien au pouvoir de M. Kagame.

"Je suis venu voter (...) car je veux que le président (Kagame) continue de nous diriger", a expliqué à Kampala Annet Mukayiramba, 22 ans.

Les observateurs doutent de la spontanéité de l'engouement populaire pour cette révision, dans un pays souvent pointé du doigt pour son manque d'ouverture politique et pour ses atteintes à la liberté d'expression. Ils accusent le Front patriotique rwandais (FPR), parti présidentiel présent à tous les échelons de la société, d'être à la manoeuvre pour permettre à M. Kagame de rester au pouvoir.

Le président rwandais a balayé les accusations de "manoeuvres" et les appels de plus en plus fermes de ses partenaires occidentaux - Etats-Unis en tête - à quitter le pouvoir à la fin de son mandat, répétant que sa décision de se représenter ou non en 2017 dépendrait du résultat du référendum.

"On connaît déjà le résultat", a assuré un Rwandais travaillant à la gare routière de Kampala, expliquant s'être abstenu. "Kagame veut rester au pouvoir, voter est une perte de temps, il obtiendra ce qu'il voudra."

Dans un éditorial jeudi, le quotidien pro-gouvernemental "New Times" estime lui aussi que le référendum "devrait se conclure en faveur du changement de Constitution" et résume l'essentiel : les électeurs rwandais "vont tracer la route pour leur pays : vont-ils garder une équipe et une formule gagnantes ou vont-ils s'aventurer dans des eaux inexplorées ?".

Avec AFP

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