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Rousseff appelle à une réforme politique pour sortir le Brésil de l'impasse


La présidente Dilma Rousseff du Brésil ( L ) parle au vice-président Michel Temer au Palais Planalto à Brasilia, Brésil, le 2 mars, 2016.
La présidente Dilma Rousseff du Brésil ( L ) parle au vice-président Michel Temer au Palais Planalto à Brasilia, Brésil, le 2 mars, 2016.

La présidente Dilma Rousseff, menacée de destitution, s'est dite prête jeudi à négocier un "grand pacte" pour sortir le Brésil de l'impasse, passant par le "respect du vote populaire" et une "indispensable réforme politique".

"Le Brésil a besoin d'un grand pacte", a déclaré à Brasilia l'impopulaire dirigeante de gauche, s'efforçant d'allumer un contre-feu à une dizaine de jours d'un vote crucial des députés sur son éventuelle destitution.

Accusée de maquillage de comptes publics en 2014, année de sa réélection, et début 2015, Mme Rousseff n'a de cesse de dénoncer une "tentative de coup d'Etat" institutionnel sans base juridique solide, orchestrée par une opposition n'ayant pas digéré sa défaite électorale de 2014.

"Un pacte doit avoir comme point de départ le respect du vote populaire et une nécessaire et indispensable réforme politique. C'est le pacte que je recherche", a insisté la présidente.

Mme Rousseff n'a pas précisé quel pacte ou quelle réforme politique elle appelle de ses voeux, ni quelle méthode elle comptait employer.

Mais ses propos semblaient faire écho aux récents appels de plusieurs personnalités politiques à convoquer de nouvelles élections pour sortir le Brésil de la crise politique qui le paralyse, en pleine récession économique.

Cette possibilité n'est pas prévue par la Constitution, qui devrait pour cela être amendée par un vote des deux tiers des parlementaires.

Moments bizarres

"Nous vivons des moments bizarres. Un moment où la claire, l'évidente absence de justifications juridiques et légales pour la destitution doit faire savoir à ceux qui tentent de promouvoir un coup d'Etat au Brésil qu'ils soumettront le pays à des risques immenses", a ajouté la présidente.

Mme Rousseff a fait valoir que sa destitution dans ces conditions créerait un dangereux précédent pour la jeune démocratie brésilienne : "Il restera pour toujours une menace pour tous et il y en aura toujours qui diront +Si le président ne vous plaît pas, destituez-le+".

La présidente "sent que sa situation ne cesse d'empirer. La procédure de destitution prend forme et il est normal qu'elle cherche à créer un effet politique", a commenté le politologue Everaldo Morales, de l'Université de Brasilia. "Mais je crois que le moment de chercher des pactes et des soutiens est passé. Certains députés partisans du gouvernement agitent l'idée de nouvelles élections pour repartir à zéro. Mais cela me paraît peu probable. Les groupes favorables à la destitution sentent leur moment venu. Il est très difficile de freiner une avalanche".

Nombre d'analystes et de responsables politiques brésiliens estiment toutefois que la procédure de destitution ne règlera pas la crise, quelle qu'en soit l'issue.

Dilma Rousseff peut encore sauver son mandat et faire avorter cette procédure. Mais elle en est réduite à batailler pour obtenir le tiers des voix des députés nécessaire à cela.

Beaucoup estiment qu'elle a perdu toute capacité de gouverner : sa coalition parlementaire a explosé, elle n'a plus la confiance des milieux économiques, et la gauche qui la soutient est hostile à son programme de coupes budgétaires.

Jeudi soir, elle a enregistré un nouveau revers : le procureur général, Rodrigo Janot, a recommandé à la cour suprême d'annuler l'entrée au gouvernement de son prédécesseur à la présidence (2003-2010) et mentor politique, Luiz Inacio Lula da Silva, noimination décidée mi-mars mais immédiatement gelée.

"Il existe des éléments suffisants pour affirmer qu'il y a eu une déviance dans la motivation du décret" présidentiel - c'est-à-dire un subterfuge pour éviter à Lula de passer devant la justice ordinaire dans le tentaculaire scandale de corruption Petrobras.

Elections anticipées ?

Mme Rousseff est acculée, mais en cas de destitution, son remplacement par le vice-président Michel Temer jusqu'aux prochaines élections de 2018 ne suscite pas grand enthousiasme, y compris chez les plus farouches adversaires de la présidente.

Le grand parti centriste PMDB du vice-président, passé la semaine dernière avec fracas dans l'opposition, pourrait former un gouvernement de transition axé sur un programme libéral de redressement économique, soutenu par la droite et les marchés.

Mais comme Mme Rousseff, il est éclaboussé au plus haut niveau par l'affaire Petrobras, dans laquelle M. Temer est à présent lui-même visé par une demande de destitution.

Leur élection pourrait également être annulée dans les prochains mois si le Tribunal supérieur électoral (TSE) estime que le financement de leur campagne électorale a été pollué par des sommes détournées du groupe pétrolier étatique Petrobras.

Dans ce cas, des élections anticipées seraient convoquées.

Or, l'enquête Petrobras apporte chaque jour de nouveaux éléments compromettants. L'ex-patron d'Andrade Gutierrez, le deuxième groupe de BTP brésilien, a affirmé aux enquêteurs que son entreprise avait financé les campagnes présidentielles de Mme Rousseff en 2010 et 2014, avec de l'argent issu de commissions occultes, selon le quotidien Folha de Sao Paulo.

Avec AFP

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