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Possible retour en politique pour l'ex-gouverneur tout juste sorti d'une prison britannique au Nigeria


James Ibori, l'ancien gouverneur de l'État du Delta, parle après avoir été entendu par la cour de Justice à Londres, en Grande-Bretagne, le 31 janvier 2017.
James Ibori, l'ancien gouverneur de l'État du Delta, parle après avoir été entendu par la cour de Justice à Londres, en Grande-Bretagne, le 31 janvier 2017.

Depuis sa cellule d'une prison britannique à des milliers de kilomètres du Nigeria, le puissant ex-gouverneur James Ibori a continué pendant des années d'exercer son influence dans son pays.

De retour après avoir purgé quatre des treize ans de prison d'une peine pour fraude et blanchiment d'argent, James Ibori pourrait réintégrer le sérail politique, après avoir été gouverneur de l'Etat pétrolier du Delta, dans le sud du Nigeria de 1999 à 2007, avancent des proches du politicien.

"La politique coule dans son sang", affirme ainsi à l'AFP Ighoyota Amori, son ancien conseiller politique. "Il va se reposer quelque temps avant de décider de la prochaine étape", poursuit M. Amori, rappelant - à l'horizon des élections de 2019 - que James Ibori reste "un parrain et un faiseur de rois".

"Aucun homme politique digne de ce nom ne peut considérer son soutien comme acquis. Son rôle restera toujours essentiel dans les affaires nationales", relève son ex-conseiller.

James Ibori, 57 ans, a été condamné en avril 2012 pour une fraude portant sur 50 millions de livres (62 millions d'euros à l'époque) à l'issue d'une longue procédure au Nigeria, puis libéré en décembre 2016 à Londres. Il est rentré le 4 février au Nigeria.

Son cas avait été perçu comme emblématique dans la lutte contre la corruption de haut niveau au Nigeria, avec des milliards de livres envoyés en Grande-Bretagne chaque année.

Il était parti en 2010 pour Dubai, aux Emirats arabes unis, d'où il avait été extradé vers le Royaume-Uni.

L'opinion publique nigériane reste divisée sur son sort, certains estimant que l'ex-gouverneur devrait répondre de plusieurs affaires devant la justice nigériane.

Mais si avoir un passé criminel peut signifier ailleurs la fin d'une carrière politique, au Nigeria, le parrainage reste essentiel, et les accusations de corruption et de conflits d'intérêt représentent rarement un obstacle pour des fonctions politiques.

'Sacrifice personnel'

Selon M. Amori, le statut de James Ibori demeure inchangé dans son fief du Delta aux yeux des membres de sa communauté avec lesquels il est resté en contact durant son emprisonnement. "Son incarcération a représenté un sacrifice personnel qu'il devait accomplir en tant que leader", estime-t-il.

L'annonce de la libération et du retour de l'ex-gouverneur sur ses terres ont été accueillis par des chants et des danses dans sa ville natale de Oghara.

"Nous sommes heureux que notre chef, notre fils, soit désormais un homme libre. Ibori est victime d'une persécution politique et d'un procès médiatique", a commenté auprès de l'AFP un responsable communautaire, Emmanuel Ighomena.

"Les habitants d'Oghara et toute la population Urhobo sont heureux de lui réserver un accueil digne d'un héros", a-t-il lancé.

Il a relevé que l'ancien gouverneur a "joué un rôle crucial dans les changements rapides de Oghara durant son mandat. Nous lui manifestons notre gratitude en lui donnant la réception qu'il mérite", a-t-il ajouté.

Pendant son mandat, James Ibori a notamment été soupçonné d'avoir utilisé des fonds de l'Etat pour financer la campagne présidentielle de Umaru Yar'Adua en 2007.

En quittant ses fonctions de gouverneur après huit ans en 2007, il s'est assuré de sa succession, qu'il a réservée à son cousin Emmanuel Uduaghan. De sa prison, il aurait même choisi le successeur de M. Uduaghan en 2015, Ifeanyi Okowa, et plusieurs autres responsables locaux.

M. Okawa aurait envoyé de hauts responsables locaux à Londres pour rendre visite à James Ibori après sa libération, "en signe de solidarité et de loyauté". Il a également organisé une réception en son honneur dans la capitale de l'Etat du Delta, Asaba.

Le gouvernement du président Muhammadu Buhari, qui a promis de faire le ménage dans la politique nigériane, pourrait lancer des poursuites contre l'influent ancien gouverneur.

Toutefois, estime Dapo Thomas, professeur de sciences politiques à l'Université de Lagos, cela irait "contre le principe même de justice d'être puni deux fois pour le même délit".

"Ibori a été puni à Londres, il ne peut pas être jugé à nouveau pour la même infraction", dit-il.

Mais Femi Falana, avocat et militant pour les droits civiques, souligne que M. Ibori était poursuivi au Nigeria avant de quitter le pays.

"Il n'y a pas de doute qu'il doit répondre à la justice", affirme-t-il, et "qu'il reste interdit (de fonctions politiques) jusqu'à ce qu'il obtienne une grâce présidentielle".

Avec AFP

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