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Togo : les employés des mines de phosphate manifestent


Une manifestation au Togo, 14 mars 2013.
Une manifestation au Togo, 14 mars 2013.

"C'est la misère chez nous. En plus, nous travaillons dans des conditions difficiles", s'exclame Tchédré Kpatcha, mécano-électricien à la Société nouvelle des phosphates du Togo (SNPT), secouée par des grèves depuis un mois.

En ligne serrée, avec leurs gilets jaune fluo et leur casque de protection vissé sur la tête, environ 500 employés de la SNPT sont descendus dans les rues de la petite commune de Hahotoé, à 40 km au nord de Lomé.

"Nous crions depuis des années et personne ne nous répond", martèle le vieil homme aux cheveux blancs, employé depuis 36 ans dans le secteur du phosphate.

A quelques kilomètres de là, dans l'immense cratère de couleur ocre, les tractopelles et tapis roulants sont à l'arrêt. Un nouveau coup dur pour ce secteur vital de l'économie togolaise.

Les grèves se multiplient depuis le 10 août, aucun accord n'ayant été trouvé face aux revendications des travailleurs. Le secteur avait été déjà paralysé en 2013 (72 heures), en 2014 (une semaine) et en 2015 (deux semaines).

Mais faute d'accord avec la direction de la société d'Etat, les quelque 1.500 personnes employées par la SNPT suspendent régulièrement leur travail depuis un mois, au sein des trois principales unités de production de Kpomé, Hahotoé et Dagbati.

"Nous invitons le chef de l'Etat à s'occuper personnellement de nos problèmes. Ça suffit", crie Lémou Tchao au milieu de la foule.

Bouclant jeudi une nouvelle grève de 48 heures, les employés du site de Hahotoé brandissaient des pancartes, peintes avec soin: "Nous voulons voir notre DG" (directeur général), "Le Togo doit être maître de son destin, fini l'esclavage".

Partis de la cité minière, ils ont sillonné les artères de Hahotoé, scandant: "Trop, c'est trop".

Ras-le-bol

Rejoints par leurs collègues du site de traitement de Kpémé (à 40 km à l'est de Lomé), les représentants des grévistes ont demandé à rencontrer la direction de la SNPT dans la capitale, qui a finalement accepté de les recevoir jeudi en fin de journée.

Les négociations devaient se poursuivre vendredi, selon Poro Egbohou, porte-parole du personnel de la SNPT.

"Nous avons manifesté pour exprimer notre ras-le-bol et dénoncer l'esclavage que nous subissons: nous ne sommes pas payés à la hauteur de notre travail, on nous exploite. Les salaires varient entre 35.000 et 241.000 FCFA (53,36 et 367,40 euros). Cette fois-ci, nous sommes décidés à aller jusqu'au bout", avertit M. Egbohou.

Les employés de la SNPT, exigent la revalorisation des salaires conformément à la grille de la convention interprofessionnelle du Togo. Ils réclament également des tenues vestimentaires et de chaussures de sécurité, ainsi que des primes de production et de rendement.

La direction n'a pas souhaité répondre aux questions de l'AFP.

Mais, selon les syndicats, un arrêt de travail de 24 heures dans cette société engendre une perte sèche de plus de 282.000 dollars.

"Nous produisons au moins 3.000 tonnes de phosphate par jour. Or le produit est vendu à 94 dollars la tonne", affirme le porte-parole du personnel.

Le phosphate était jusqu'au milieu des années 1990, le poumon économique du Togo et son premier produit d'exportation, représentant 40% des recettes de l'Etat.

Mais le secteur, entièrement public, a été fortement affecté par la mauvaise gestion et la corruption entre 1997 et 2007 et s'est totalement effondré pendant cette période, passant de 5,4 millions de tonnes de production annuelle à 800.000 tonnes.

En 2010, le gouvernement a mis en place un plan de relance estimé à plus de 200 milliards de FCFA (près de 305 millions d'euros) pour doper la production.

En septembre 2015, le groupe minier israélien Elenilto, associé au géant chinois Wengfu, a remporté un appel d'offre international pour exploiter une production annuelle de 5 millions de tonnes de phosphate, d'engrais et d'acide phosphorique.

Mais malgré le plan de redressement mis en place par l'Etat togolais et la hausse de la demande mondiale, notamment pour l'utilisation d'engrais agricole, le secteur peine à retrouver ses niveaux de production de la fin des années 1990. La SNPT a extrait 1,5 million de tonnes de phosphate en 2015 contre 1,11 million en 2014.

Avec AFP

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