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Le foot zambien secoué par le débat sur l'homosexualité


Siège de la FIFA, Zurich, Suisse, le 29 octobre 2007.
Siège de la FIFA, Zurich, Suisse, le 29 octobre 2007.

L'homosexualité n'est pas seulement jugée immorale en Zambie, elle est aussi un crime . Alors, quand les autorités du football local ont proposé de bannir toute discrimination contre les gays ou les lesbiennes, elles ont forcément provoqué un tollé.

La controverse a débuté à la fin de l'année dernière, lorsque la Fédération zambienne de football (FAZ) a commencé à faire circuler un projet de nouveau règlement intérieur, aligné sur celui imposé par la Fifa, l'instance mondiale du ballon rond.

L'article 3 du texte stipule ainsi que "toute forme de discrimination contre un pays, une personne ou un groupe de personnes fondée sur (...) l'orientation sexuelle est strictement interdite et passible de suspension ou d'expulsion".

Sitôt sur la place publique, il a fait bondir les chefs de l'Eglise zambienne et une brochette de gloires locales du football, qui ont crié au viol des valeurs chrétiennes défendues par la Constitution.

La loi fondamentale du pays n'interdit pas explicitement les relations homosexuelles. Toute en circonvolutions, elle prohibe toute "relation charnelle contre l'ordre naturel".

Et son code pénal punit la sodomie, bannie depuis la colonisation britannique, d'un maximum de quinze ans de prison.

Colère de Dieu

"La Zambie est une nation chrétienne et toute recommandation de la Fifa qui entre en conflit avec le christianisme n'est pas la bienvenue", tranche un ex-membre du comité directeur de la FAZ, Masha Chilemena, à la pointe du combat contre l'article maudit.

"La FAZ ne peut pas contredire la loi du pays", poursuit-il, "et si la Fifa impose des sanctions à la Zambie eh bien tant pis, nos équipes ne joueront plus qu'en ligue locale".

Tout aussi remonté, le président de la Fédération internationale des églises chrétiennes (IFCC), Simon Chihana, a menacé les patrons du football zambien d'un carton rouge. S'ils adoptent un règlement qui interdit la discrimination contre les homosexuels, dit-il, ils "subiront la colère de Dieu".

"Notre Nation est bénie, nous ne pouvons autoriser une institution ou un individu à y importer les pratiques de Sodome et Gomorrhe", plaide M. Chihana.

Ces convictions antigays sont largement partagées dans le pays.

Réélu l'an dernier, le président Edgar Lungu, s'est fait lui-même remarquer plusieurs fois par ses diatribes contre les homosexuels, en dépit des invites insistantes à la tolérance de certains des principaux pays donateurs de la Zambie.

"Ceux qui défendent les droits des gays devraient aller en enfer", a-t-il lâché en 2013, alors ministre des Affaires étrangères, à l'endroit de deux hommes poursuivis pour actes "contre nature".

Plus de contradiction

Ces deux accusés ont finalement été acquittés par la justice, mais après avoir passé plus d'un an en détention provisoire.

L'homosexualité est également considérée comme illégale dans plus d'une trentaine de pays du continent africain. Et même punie de la peine capitale en Mauritanie, au Soudan et dans certaines provinces du Nigeria ou de la Somalie.

Pour apaiser la polémique, le secrétaire général de la FAZ, Ponga Liwewe, rappelle à chacune de ses sorties que son règlement controversé n'est pour l'heure qu'un brouillon et a promis de s'assurer qu'il ne violerait pas la loi zambienne.

"Quand il sera définitif, ce texte sera conforme aux lois du pays et du football, sans contradiction entre les deux", assure-t-il.

Pris entre deux feux, le patron du foot zambien subit aussi les pressions des défenseurs des droits de l'Homme, qui l'implorent de ne pas capituler face à la croisade de l'Eglise.

"Les intégristes, pour la plupart des Pentecôtistes, trompent le gouvernement et les masses", accuse le militant Paul Kasonkomona, lui-même poursuivi en 2013 - avant d'être acquitté - pour avoir osé réclamer la dépénalisation des relations homosexuelles.

"La Constitution dit que les droits de tous doivent être respectés", rappelle-t-il. "Je ne pense pas que la FAZ doive se sentir coupable: ils ne demandent pas aux gens d'avoir des relations sexuelles", ajoute M. Kasonkomana, "ce n'est quand même pas un péché d'être gay".

Avec AFP

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