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L'Ougandais Dominic Ongwen, un enfant-soldat devenu un chef sanguinaire de la LRA


Dominic Ongwen, au centre, est un ancien commandant de la LRA, jugé à la CPI à La Hague, le 21 janvier 2016.
Dominic Ongwen, au centre, est un ancien commandant de la LRA, jugé à la CPI à La Hague, le 21 janvier 2016.

Enlevé par des rebelles dans le nord de l'Ouganda alors qu'il était enfant, Dominic Ongwen, dont le procès s'ouvre mardi devant la CPI, était devenu au fil des ans un des commandants les plus redoutés de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA).

Ongwen, qui serait jeune quadragénaire - sa date de naissance est inconnue -, comparaîtra devant la Cour pénale internationale (CPI) pour des crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis dans le nord de l'Ouganda sur la période 2002-2005.

Celui qui était le chef des opérations de la LRA, et le troisième dans l'échelle de commandement de la sanguinaire rébellion ougandaise après son chef Joseph Kony et son adjoint Okot Odhiambo, est notamment accusé d'esclavage sexuel et de recrutement d'enfants soldats.

Surnommé la "fourmi blanche", Ongwen a été présenté par la CPI comme "le fer de lance" de la LRA. Ce groupe a massacré plus de 100.000 personnes et enlevé plus de 60.000 enfants, selon l'ONU, dans une guerre sanglante contre le pouvoir central de Kampala.

Selon l'ONG américaine Enough, Ongwen est originaire de Lamogi, près de la ville de Gulu, dans le nord-est de l'Ouganda. Fils de deux professeurs, il a été enlevé vers l'âge de 10 ans alors qu'il rentrait de l'école, affirme le programme ougandais Justice et Réconciliation.

Créée aux alentours de 1987, la LRA opérait alors dans le nord de l'Ouganda, où elle a multiplié les exactions: enlèvements d'enfants transformés en soldats et en esclaves, et mutilations de civils. Elle en a été chassée au milieu des années 2000 par l'armée ougandaise, avant de s'éparpiller dans les forêts équatoriales des pays alentour.

Des victimes de la LRA ont raconté les rites initiatiques brutaux de la milice, des enrôlés de forces contraints de mordre et matraquer amis et parents à mort, de boire du sang. Il est probable qu'Ongwen ait lui-même dû en passer par là.

En dépit de sa jeunesse, il a très vite été repéré pour sa loyauté dans le crime, son courage au combat et ses qualités de tacticien.

Très proche de Vincent Otti, autre leader historique de la LRA exécuté en 2007 sur ordre de Kony, Ongwen est un des rares responsables du mouvement à s'être opposé à plusieurs reprise à son leader emblématique.

Malgré ses insubordinations répétées, Kony - qui est toujours recherché - l'a épargné, sans doute conscient de sa bravoure et de son irremplaçable expérience du combat dans le maquis.

Victime et criminel

Entre 2002 et 2003, Ongwen est soupçonné d'avoir lui-même commandé de terrifiantes campagnes dans les régions de Lira et Teso, dans le nord de l'Ouganda, au cours desquelles quelque 2.000 personnes auraient été massacrées et 3.000 autres enlevées.

Après avoir plusieurs fois tenté, en vain, de signer des accords de paix avec Kony, l'Ouganda, soutenu par des armées régionales, a encore mené, à partir de fin 2008, des frappes aériennes contre des camps de la LRA dans le parc national de la Garamba, en RD Congo.

Ces attaques n'ont jamais permis d'annihiler la LRA ou de tuer Kony et ses lieutenants. La LRA s'est ensuite disséminée en petits groupes dans la forêt, y poursuivant enlèvements et massacres au gré de ses raids dans les villages de brousse pour se ravitailler.

Ongwen, qui a été le plus jeune combattant de la LRA à décrocher le titre de général de brigade, est accusé d'avoir joué un rôle clé dans les représailles contre les civils en RDC.

La LRA ne disposerait plus aujourd'hui que de quelques centaines d'hommes, dispersés en RDC, en République centrafricaine, au Soudan du Sud et au Soudan.

Ongwen s'était rendu aux forces spéciales américaines en janvier 2015 en Centrafrique. A l'époque, les États-Unis avaient mis sa tête à prix pour 5 millions de dollars (4,5 millions d'euros).

Ongwen est décrit comme à la fois "la victime et l'auteur de crimes" devant répondre à la justice internationale par Mark Kersten, un spécialiste de la question basé à Londres.

"Quand la victime est-elle un responsable et le responsable une victime ? La frontière entre les deux est beaucoup moins claire qu'on a tendance à le supposer", avance ce dernier.

Avec AFP

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