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Des Casques bleus italiens au secours des trésors de Visso


Un pompier et son chien de sauvetage après un tremblement de terre à Borgo Sant'Antonio près de Visso, au centre de l'Italie, le 27 octobre 2016.
Un pompier et son chien de sauvetage après un tremblement de terre à Borgo Sant'Antonio près de Visso, au centre de l'Italie, le 27 octobre 2016.

L'émotion est grande dans la petite sacristie toute fissurée de l'église médiévale Saint François à Visso (centre) : les "Casques bleus" italiens venus sauver les trésors culturels de cette région dévastée par les séismes viennent de découvrir une fresque magnifique.

Les couleurs pâles, ocres et violettes, de cette crucifixion, probablement peinte par le maître Paolo de Visso au XVe siècle, se révèlent petit à petit sous les décombres, derrière le grand meuble de la sacristie miraculeusement encore debout.


Le sauvetage de cette oeuvre est le résultat d'un travail minutieux, méthodique et surtout collectif auquel participent des carabiniers experts en patrimoine culturel, des historiens, des archéologues, des architectes...

Ils forment le corps des "Casques bleus de la culture", instauré il y a un an par l'Italie en partenariat avec l'Unesco pour protéger et secourir les monuments historiques, les vieilles églises et les oeuvres d'art meurtries par les tremblements de terre.


Dans les décombres de l'église Saint François, une quarantaine de personnes armées de gants et de casques -- jeunes volontaires, experts en art, fonctionnaires du ministère de la Culture, pompiers, membres de la protection civile et carabiniers des Casques bleus -- tentent d'extraire délicatement les pièces qui ornèrent ce joyaux du Moyen-Age.

"C'était l'église la plus ancienne de la région des Marches, une région avec des trésors inestimables et qui comptait pas moins de 483 églises", explique le responsable du chantier, Pierluigi Morricone, historien d'art qui travaille pour l'unité de crise mise en place par le ministère de la Culture.

"Nous sauvons environ 600 oeuvres d'art par jour. Soit au moins 5.000 au cours des dernières semaines", précise-t-il avec fierté.

- Libye, Syrie, Irak... -

Visso, la "perle" des Monts Sibyllins, fondée en l'an 907 et qui a survécu à tous les types de pillage depuis l'empire byzantin, espère renaître même si tous les habitants ont été temporairement relogés ailleurs depuis les deux secousses de magnitude 5,5 puis 6,1 qui ont endommagé tous les bâtiments mais sans faire de victime le 26 octobre.

"La priorité est de sauver des oeuvres, des peintures, des fresques, des reliques, des sculptures, des statues, des objets liturgiques, des candélabres, des crucifix, des ostensoirs, des encensoirs", énumère M. Morricone, qui répertorie et emballe chaque objet.

Avec une patience infinie, muni d'une brosse en soie, Antonio nettoie la couche de poussière sur une peinture du XVIIIème siècle représentant une vierge avec une couronne d'or qui porte l'enfant Jésus. Comme par miracle, les habits rouge et bleus reprennent vie, les anges réapparaissent.

"Visso est une ville d'art. Ce qui se passe est un drame. Nous devons récupérer ce territoire. Nous ne pouvons pas abandonner", affirme Antonio, qui dirige un musée à une centaine de kilomètres de là et vient chaque lundi, jour de fermeture, participer comme volontaire aux sauvetages.


"Nous sommes ici depuis le premier tremblement de terre, celui du 24 août qui a fait 300 morts (dans la région d'Amatrice, à une cinquantaine de kilomètres au sud). Une série de séismes dévastateurs ont suivi", raconte le capitaine de carabiniers Paolo Montorsi, l'un de ces nouveaux Casques bleus désormais prêts à partir en mission dans le monde.

Créé en février 2016 en partenariat avec l'Unesco, ce corps compte désormais 30 carabiniers spécialisés et 30 experts prêts à intervenir dans les zones de catastrophes ou de conflits.

La formation de 40 autres doit commencer dans quelques mois et l'Italie, qui organisait jeudi à Florence (centre) le premier G7 de la culture, assure que de nombreux pays souhaitent lui emboîter le pas.

"Nous sommes préparés pour travailler dans n'importe quel pays. En Libye, en Syrie, en Irak, nous avons beaucoup d'expérience dans le domaine de la protection des biens culturels", explique le capitaine Montorsi.

"Les carabiniers italiens comptent la sauvegarde du patrimoine parmi leurs prérogatives depuis 1969 et ont déjà formé des policiers de nombreux pays", ajoute-t-il, tout en coordonnant le départ de camions chargés de trésors en partance pour des entrepôts dont l'emplacement restera secret.

Avec AFP

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