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La faim et les shebab en toile de fond de la présidentielle somalienne


Le président somalien Hassan Sheikh Mohamud est escorté à sa sortie d'une réunion de l'Union africaine dans la capitale éthiopienne de Addis Ababa, le 30 janvier 2017.
Le président somalien Hassan Sheikh Mohamud est escorté à sa sortie d'une réunion de l'Union africaine dans la capitale éthiopienne de Addis Ababa, le 30 janvier 2017.

Députés et sénateurs somaliens doivent choisir mercredi le président de ce pays miné par les attaques des islamistes shebab et menacé par la famine, au terme d'un processus électoral entaché de nombreuses accusations de corruption et de trucage.

Vingt-trois candidats au total, dont le président sortant Hassan Sheikh Mohamud, briguent le poste de chef de l'Etat.

Le vainqueur sera désigné par 275 députés et 54 sénateurs nouvellement élus, lors d'un scrutin à plusieurs tours organisé, sécurité oblige, dans un hangar de l'aéroport de Mogadiscio. Défendu par la mission de l'Union africaine en Somalie (Amisom), cet aéroport est considéré comme le lieu le mieux protégé de la capitale. Il abrite notamment des bureaux des Nations unies et des ambassades.

Prévue en août, l'élection du président a été plusieurs fois repoussée. Elle doit ponctuer un processus électoral construit autour du système clanique régissant la politique de ce pays privé de véritable état central depuis la chute de l'autocrate Siad Barre en 1991.

Quelque 14.000 électeurs délégués - sur les 12 millions de Somaliens - ont voté entre octobre et décembre 2016 pour élire les nouveaux députés, parmi des candidats généralement choisis à l'avance par consensus et représentant chaque clan ou sous-clan.

Dans un rapport publié mardi, l'ONG anti-corruption somalienne Marqaati affirme que ce processus, entaché de nombreuses accusations de trucage et de marchandage, est "défiguré par la corruption".

Le suffrage universel avait été initialement promis aux Somaliens. Mais cet engagement a été abandonné en 2015 en raison de luttes intestines et de tergiversations politiques combinées à une insécurité chronique due principalement aux islamistes shebab, affiliés à Al-Qaïda, qui contrôlent de larges zones rurales et frappent régulièrement Mogadiscio.

Il s'agit cependant d'une avancée démocratique par rapport aux élections de 2012, où seulement 135 "elders" (notables) avaient désigné l'ensemble des députés. L'instauration du suffrage universel est désormais planifiée pour la prochaine élection en 2020.

'Comédie dramatique'

A Mogadiscio, beaucoup sont désabusés par ce processus électoral. "Peu importe qui devient président, je m'en fous", soutient Qoje Siyad, un ouvrier de la capitale. "Tout ce dont nous avons besoin, c'est de pouvoir continuer notre business".

"Ça prend trop de temps, les gens seront soulagés quand cette comédie dramatique se terminera", a pour sa part déclaré Samiya Abdulkadir, une femme au foyer.

L'issue du scrutin de mercredi reste incertaine tant il est probable que les différents clans ajustent leurs stratégies au fil des tours de vote. Les 23 candidats sont tous des hommes, et ont chacun payé des frais d'inscription de 30.000 dollars (28.000 euros).

Quelques candidats se détachent toutefois, dont l'actuel président Hassan Sheikh Mohamud, 61 ans, ancien universitaire et activiste de la société civile, issu du clan Hawiye.

Son prédécesseur à la présidence, Sharif Sheikh Ahmed, 52 ans, est lui aussi candidat. Egalement du clan Hawiye, il est un ancien chef de l'Union des tribunaux islamiques de Somalie dont les shebab sont issus.

Les principaux candidats du clan Darod sont l'actuel Premier ministre Omar Abdirashid Ali Shamarke, 56 ans, et l'ancien Premier ministre Mohamed Abdullahi Mohamed 'Farmajo', 55 ans. Les deux hommes ont une double nationalité, ayant vécu pendant des années respectivement au Canada et aux Etats-Unis.

La Somalie est plongée depuis près de trois décennies dans le chaos et la violence entretenus par des milices claniques, des gangs criminels et des groupes islamistes. La dernière élection véritablement démocratique remonte à presque 50 ans, en 1969.

La semaine dernière, le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) a par ailleurs mis en garde contre une "possible famine", provoquée par une sécheresse particulièrement sévère, et qui menace quelque 3 millions de Somaliens.

Après deux saisons des pluies pauvres en précipitations, les travailleurs humanitaires redoutent le retour d'une sécheresse aussi dévastatrice que celle de 2010-2011, qui avait fait 250.000 morts.

L'Ocha a estimé que si les maladies et le conflit figurent parmi les causes récurrentes des "souffrances humanitaires" de la Somalie, "l'impact de cette sécheresse représente une menace d'une échelle et d'une magnitude différentes".

Avec AFP

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