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Euro-2016 - Séville, 1982 : La France, l'Allemagne, le drame et la colère


Victoire de l'Allemagne contre l'Italie - EURO 2016
Victoire de l'Allemagne contre l'Italie - EURO 2016

"L'espoir, la joie, la haine, le drame" pour Alain Giresse, "une plaie qui restera éternellement" pour Bernard Genghini... C'est un traumatisme pour le foot français, un classique des classiques ailleurs dans le monde: les Bleus se souviennent du mythique France-Allemagne au Mondial-1982.

La perspective d'Allemagne - France jeudi à Marseille en demi-finale de l'Euro-2016 fait ressurgir les souvenirs de cette demi-finale de Coupe du monde le 8 juillet 1982, entre les Bleus et la RFA.

"Ce match de Séville, c'est mythique, même les plus jeunes en ont entendu parler par leur père ou grand-père. Ce match est inoubliable, il est resté dans la légende du foot par son déroulement, sa dramaturgie, et par toutes les émotions qu'il a pu procurer", synthétise Genghini, un des acteurs en milieu de terrain sur la pelouse andalouse.

L'image est dans toutes les mémoires des quadragénaires ... et même des plus jeunes qui ont cherché sur le Net à force d'en entendre parler : le Français Patrick Battiston, violemment percuté par le gardien allemand Harald Schumacher, est allongé sur une civière, inanimé, la main tenue par son capitaine Michel Platini.

"Il y a toujours une petite référence mais qui s'estompe de plus en plus, tant mieux, on passe à autre chose", évacue Battiston, 59 ans, qui mettra du temps à se remettre d'une vertèbre cervicale fissurée, sans oublier ses dents cassées. C'était une autre époque. Schumacher ne prend pas de carton rouge et le match continu.

"Quand j'y pense, ça me met en colère. Je n'en veux pas à Schumacher, mais à l'arbitre qui dirigeait la partie", enrage aujourd'hui encore l'ancien défenseur des Bleus Marius Trésor, 66 ans.

"Pour nous, cette injustice restera éternellement, même si la génération d'aujourd'hui est passée à autre chose", reprend Genghini, 58 ans. Il venait d'être remplacé depuis 10 minutes par Battiston avant cette scène hallucinante et garde en mémoire "des sentiments de haine, de colère".

- 'Plus loin que le football' -

Giresse, 63 ans, n'a rien oublié lui non plus : "Sur l'agression contre Battiston il n'y a rien de sifflé, ni rouge, ni jaune, même pas coup franc, zéro ! Sur le deuxième but allemand il y a faute sur moi et sur Michel Platini", s'enflamme encore l'ex-milieu de terrain.

Les France - Allemagne opposent des pays qui sont aussi deux vieux rivaux au sein de l'Europe. Lors de telles affiches, le football fait-il écho à l'histoire commune parfois conflictuelle des deux pays ?

"On ne va pas aller si loin, mais après ce match beaucoup de sentiments sont ressortis", répond Genghini. Et d'admettre tout de même que "ça allait plus loin qu'un simple match de football".

Au moment où Battiston est percuté de plein fouet par Schumacher, le score est de 1-1. Platini a répondu sur penalty à un but de Littbarski. La marque ne bouge pas dans le temps réglementaire mais en prolongation le match devient fou. La France mène rapidement (3-1), grâce à Tresor et Giresse, extatique.

"Ce soir-là nous sommes passés par tous les états émotionnels imaginables en deux heures, c'est difficile de garder un bon souvenir d'une si cruelle défaite, mais à moi il me reste cet instant-là, ces quelques secondes après mon but, d'une intensité inouïe. Je remercie la vie de me l'avoir offert", s'émeut "Gigi".

- 'On va gagner' -

Car les Allemands égalisent et arrachent la séance des tirs au but. Après un raté allemand, Didier Six a l'occasion de qualifier les Bleus ; échec. La chance est passée. Maxime Bossis rate son tir. Horst Hrubesch qualifie l'Allemagne (3-3 a.p ; 5-4 t.a.b.).

"On est passé à côté de quelque chose de grand", dissèque Giresse dans un mea-culpa collectif : "Notre responsabilité est d'avoir continué à jouer à 3-1, nous aurions peut-être dû être un peu plus gestionnaires".

"C'est évidemment la plus grande déception de ma carrière. Je ne pensais pas qu'on puisse passer par autant d'émotions si fortes et si différentes en si peu de temps, l'espoir, la joie, la haine, le drame", souffle l'ex-joueur emblématique des Girondins de Bordeaux, devenu sélectionneur du Mali.

Et aujourd’hui ? Les France - Allemagne sont-ils toujours aussi brûlants ? "C'est toujours des rencontres particulières parce qu'on est des voisins", assure Genghini.

Battiston, lui, s'impatiente avant le Allemagne-France de l'Euro qui se jouera jeudi 7 juillet 2016, 34 ans quasiment jour pour jour après ce jeudi 8 juillet 1982 : "C'est une autre demi-finale, mais il n'y a pas de rapport particulier avec Séville. Là, c'est une demi-finale qu'on va gagner".

Avec AFP

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