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En Iran, une motarde fait avancer les droits des femmes


Une Iranienne, après avoir voté (Parlement et Assemblée des experts), Qom, le 26 février 2016.
Une Iranienne, après avoir voté (Parlement et Assemblée des experts), Qom, le 26 février 2016.

Sur sa grosse cylindrée tout terrain, Behnaz Shafiie, jeune motarde iranienne, s'élance sur une piste en terre près de Téhéran pour réaliser un saut spectaculaire d'une quinzaine de mètres.

A 27 ans, cette jeune femme est devenue le symbole du combat de ces Iraniennes qui, avec courage, ont réussi à s'imposer sur une moto malgré les contraintes du pouvoir qui leur interdit de circuler en deux roues sur la voie publique.

Mais elles peuvent désormais le faire sur des pistes spéciales: à l'entrée de l'une d'elles située à Parand, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Téhéran, deux grandes banderoles précisent bien qu'elle est "réservée aux femmes". Celle des hommes, plus vallonnée et plus longue, est située à proximité.

Si les pistes sont bien délimitées, Behnaz Shafiie s'entraîne néanmoins avec un homme, Javad Zanjani, vieux spécialiste du motocross qu'il pratique depuis 35 ans.

Grâce à son obstination, la jeune femme a pu réaliser son rêve, en obtenant récemment l'autorisation pour les femmes de faire de la moto sur circuit ou sur piste, ainsi que d'organiser et de participer à des compétitions.

"J'avais 15 ans quand j'ai vu pour la première fois une femme circuler à moto dans un petit village du côté de Zanjan (nord). J'ai été surprise et je lui ai demandé si les femmes avaient le droit de faire de la moto, elle m'a alors montré comment faire et j'ai aimé ça", raconte-t-elle à l'AFP, debout devant son engin, vêtue d'une combinaison bleue, rouge et noire.

Behnaz Shafiie prend soin de cacher ses cheveux sous un bonnet ou sous un casque lorsqu'elle enfourche sa moto, afin d'éviter toute critique: depuis la révolution islamique de 1979, les femmes en Iran doivent porter un voile ou un foulard en public.

'A la cuisine'

La jeune femme a acheté sa première moto à 22 ans, mais c'est seulement depuis trois ans qu'elle a décidé d'en faire son métier malgré les obstacles.

"Pendant deux ans, j'ai fait de la moto le soir derrière la maison en m'habillant en garçon", se souvient-elle. "Lorsque les gens se rendaient compte que j'étais une femme, la plupart m'encourageaient, mais certains hommes disaient que ma place était devant la machine à laver ou à la cuisine", note la jeune femme en riant.

Sa persévérance a fini par payer: il y a six mois, les femmes ont obtenu le droit de faire de la moto sur piste et depuis, deux compétitions féminines ont déjà été organisées.

"Avant c'était illégal, mais aujourd'hui, il y a une dizaine de femmes qui font de la moto en tant que professionnelles", affirme Behnaz Shafiie, qui a gagné la première compétition féminine de motocross jamais organisée en Iran.

Elle dit connaître personnellement au moins "une cinquantaine" de femmes qui pratiquent le motocross pour le plaisir.

La piste pour femmes proche de Téhéran a été ouverte il y a deux mois. "Nous y avons organisé une journée de formation. Entre 40 et 50 femmes sont venues pour s'initier", confirme l'entraîneur de Behnaz Shafiie.

La jeune motarde espère qu'un jour les femmes seront aussi autorisées à rouler à moto en ville. Si elles sont nombreuses à conduire une voiture en Iran, les autorités refusent pour l'instant de leur délivrer des permis moto.

'Montrer l'exemple'

"Beaucoup d'Iraniennes se plaignent des restrictions qui les empêchent de faire plein de choses dans le pays", mais "beaucoup 'brillent' malgré les contraintes", affirme Behnaz qui dit avoir "voulu montrer l'exemple".

"Lorsqu'on se bat pour ses idées, on peut certainement réussir", ajoute-t-elle.

Le premier pas qu'a été l'autorisation donnée aux femmes de faire de la moto sur piste ou circuit est la "preuve", selon elle, que les Iraniennes peuvent "faire reculer les restrictions" politiques et sociales.

Signe de cette évolution, les étudiantes sont plus nombreuses que les étudiants dans les universités et il y a de plus en plus de femmes qui pratiquent un sport professionnel dans différentes disciplines comme le karaté, l'athlétisme, le volley et le basket-ball.

Elles participent et gagnent des compétitions internationales, même si elles doivent toujours porter le voile. Ce qui les empêche de participer à certaines disciplines comme la natation.

Avec AFP

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