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Côte d'Ivoire : l'abstention, clé du référendum sur une nouvelle Constitution


Le président de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, à droite, et son homologue indien Pranab Mukherjee, à gauche, se saluent lors de la visite de ce dernier à Abidjan, Côte d’Ivoire, 14 juin 2016.
Le président de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, à droite, et son homologue indien Pranab Mukherjee, à gauche, se saluent lors de la visite de ce dernier à Abidjan, Côte d’Ivoire, 14 juin 2016.

Le taux de participation des 6,3 millions d'Ivoiriens appelés à voter dimanche lors du référendum sur une nouvelle constitution voulue par le président Alassane Ouattara sera la principal enjeu d'un scrutin que l'opposition a appelé à boycotter et dont l'issue ne fait donc guère de doute.

"Oui à la modernité", "Oui à la Paix" prônent les affiches placardées dans le pays par le pouvoir pour lequel le projet de Constitution doit permettre de stabiliser le pays. Pour l'opposition, le texte est "rétrograde" et "monarchique".

"Il n'y a pas beaucoup d'engouement", note le chercheur Meite Mamoudou qui, comme de nombreux observateurs, pronostique une "forte abstention".

"Les dernières élections (présidentielle 2015) montrent que la participation est faible. Normalement, un débat sur une Constitution devrait être un grand enjeu, mais en Afrique, les gens sont souvent plus intéressés par des élections avec des hommes politiques", ajoute-t-il, soulignant qu'il y a "un fort taux d'illettrisme, donc les gens ont du mal à connaitre le texte".

"Tout ça, c'est des conneries! Ce qui nous intéresse c'est la vie chère, sortir de la pauvreté. Les riches sont plus riches et les pauvres restent pauvres. La Constitution ne va rien changer. Je n'irai pas voter", s'emporte Bamory Koné, un mécanicien d'Adjamé, un quartier qui a pourtant voté majoritairement pour le président Ouattara en 2015.

Selon le président, qui avait promis une nouvelle Constitution lors de sa réélection en 2015 pour un deuxième mandat courant jusqu'en 2020, le texte va permettre de "tourner définitivement la page des crises successives" qui ont secoué le pays pendant une décennie.

Selon le pouvoir, la nouvelle constitution évacue le concept d'"ivoirité" en clarifiant les conditions d'éligibilité du président. Ses détracteurs avaient reproché à Ouattara son origine burkinabè et contesté son éligibilité (il n'avait pu se présenter que grâce à un décret). Le pays n'avait pas été loin de sombrer dans la guerre civile.

Le texte prévoit la création d'un poste de vice-président qui alimente tous les fantasmes. Si la Constitution est acceptée, le président doit nommer un vice-président qui aura toutes les chances d'être considéré comme son successeur.

En outre, la Constitution créé un Sénat, institutionnalise la Chambre des rois et chefs traditionnels et étend le domaine de compétence du Conseil économique et social à l'environnement.

- Désert électoral -

Pour le président de l'Assemblée nationale, l'ancien chef rebelle Guillaume Soro qui a des ambitions présidentielles, c'est "la stabilité de la Côte d'Ivoire que le président Ouattara recherche", précisant que le pays "a souffert 25 ans d'instabilité".

Pour le politologue Jean Alabro, "autant l'actuelle Constitution (de 2000) était contre Ouattara , autant celle-ci est pour Ouattara et son camp. Il organise sa succession".

De son côté, l'ensemble de l'opposition (deux coalitions distinctes) a appelé au boycottage tandis que depuis sa prison à la Cour pénale internationale à La Haye, l'ex-chef des "Jeunes patriotes" Charles Blé Goudé a appelé à "un désert électoral pour dire +NON+ à cette imposture".

"Comme quelqu'un l'a dit +Pourquoi se contenter de participer au digestif alors qu'on vous a exclu de l'entrée et du plat de résistance+", a ironisé Pascal Affi Nguessan, le président du Front populaire ivoirien (FPI), fondé par l'ancien président Laurent Gbagbo, principal parti d'opposition.

Il estime que le texte a été préparé "en catimini" et souligne que ni l'opposition ni la société civile n'ont été consultées. Pour lui, le président Ouattara "opère avec la Côte d'Ivoire comme un propriétaire vis-à-vis d'un patrimoine personnel".

Baptisée "le Front du refus", l'autre coalition de l'opposition développe les mêmes idées. Elle a vu un des ses meetings interdit à Abidjan la semaine dernière. Quelques centaines de manifestants ont été dispersés et ses leaders brièvement interpellés.

L'attitude des autorités a été épinglée par l'ONG Human Rights Watch qui estime qu'"avec à peine sept jours pour faire campagne, des ressources insuffisantes, un manque d'accès aux médias contrôlés par l'État et la suspension, à la veille de la campagne, de deux journaux proches de l'opposition, les partis d'opposition ont du mal à défendre leur point de vue auprès de l'opinion publique".

Avec AFP

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