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"Opération de désarmement" à Bujumbura, les Burundais fuient les quartiers contestataires


Une femme transporte ses effets personnels à Bujumbura, le 7 novembre 2015. (AP Photo)
Une femme transporte ses effets personnels à Bujumbura, le 7 novembre 2015. (AP Photo)

Suite à la fin de l'ultimatum, les fouilles policières ont commencé dans les quartiers contestataires de Bujumbura, mais la plupart des habitants ont fui. Plusieurs personnes ont également été tuées dans deux attaques de bars.

Le scénario fait penser à une exécution. Au moins neuf personnes (le bilan précédent était de sept morts et deux blessés) ont été tuées dans la nuit de samedi 7 à dimanche 8 novembre, au cours de l'attaque d'un bar dans un quartier d'opposants du sud de Bujumbura, a appris l'AFP auprès de l'administration et de témoins.

Selon ces sources, un groupe armé a pénétré vers 20 h locales (18 h GMT) dans un bar du quartier de Kanyosha où ils ont forcé des personnes qui prenaient leurs verres dehors à rentrer à l'intérieur du bar avant de leur ordonner de se coucher à terre.

"Ils leur ont tiré dessus froidement, c'était vraiment une exécution et ils ont fait sept morts et deux blessés", a déclaré à l'AFP le maire de Bujumbura, Freddy Mbonimpa. Une enquête, a-t-il dit, est en cours pour identifier ces "assassins".

Contactés après l'attaque, des témoins ont affirmé à l'AFP que "ces gens étaient en tenue policière", accusant "des agents de police et des Imbonerakure (ligue des jeunes du parti au pouvoir) d'être responsables de ce massacre".

Cette attaque a eu lieu quelques heures avant l'expiration de l'ultimatum lancé par le président burundais Pierre Nkurunziza à ses opposants pour qu'ils déposent les armes.

Selon deux sources contactées par VOA Afrique, un autre incident a eu lieu dans un bar du centre de la capitale, "Le Petit Suisse". Le bilan n'est pas encore confirmé.

Les populations fuient les quartiers contestataires

"A part cette ignoble attaque dans ce bar de Kanyosha, cette nuit a été très calme dans la mairie de Bujumbura", a expliqué M. Mbonimpa, reconnaissant toutefois que "les quartiers contestataires, surtout ceux situés dans le nord, se sont pratiquement vidés de tous leurs habitants qui ont fui à cause de la peur et de rumeurs infondées de violence".

Dimanche à l'aube, des centaines de policiers ont encerclé le quartier de Mutakura, dans le nord de la capitale, où ils procèdent à des fouilles "maison par maison", selon des témoignages recueillis par téléphone.

Mais "la plupart des insurgés ne sont plus là, ils ont profité du sauve-qui-peut général pour prendre le large", a assuré à l'AFP dimanche une source proche de leurs milieux.

"L'opération de désarmement forcé est en cours depuis ce matin à Mutakura et elle se déroule dans le calme jusqu'à cette heure", a annoncé dans l'après-midi à l'AFP Remy Barampama, l'administrateur de la commune de Ntahangwa, qui englobe Mutakura.

"Des fusils et des grenades ont déjà été saisi, (...), mais sachez que l'opération ne fait que commencer et qu'elle devra se poursuivre dans les jours qui viennent", a-t-il affirmé.

La police a présenté à des journalistes à la mi-journée une dizaine de fusils, dont des kalachnikovs, et des grenades.

"J'appelle la population à la sérénité car elle voit bien que les forces de l'ordre ne leur font aucun mal", a lancé M. Barampama, appelant les habitants "à regagner leurs maisons tout en se désolidarisant des criminels armés qui les ont pris en otage".

La présidence avait tenté samedi de rassurer la communauté internationale qui redoute des violences ethniques à grande échelle, alors que les populations des quartiers contestataires de Bujumbura, prises de panique, fuyaient ces zones.

"Crainte des pillages"

"Dès que j'ai entendu le discours du président Nkurunziza et les propos de ses ministres, j'ai décidé de fuir car j'ai compris que les choses ont changé", affirme Marie, une secrétaire quadragénaire qui a trouvé refuge avec ses cinq enfants chez une parente, dans un quartier plus calme de Bujumbura.

"J'ai été terrorisée, j'ai compris que cette fois ils allaient nous tuer jusqu'au dernier", lance-t-elle. Son mari, lui, est resté par "crainte des pillages".

"Il ne reste pratiquement que des hommes qui protègent leurs biens et des jeunes, tous les autres ont fui", renchérit un habitant du quartier de Mutakura sous couvert d'anonymat.

Signe de l'urgence de la situation, l'émissaire américain pour l'Afrique des Grands Lacs, Thomas Perriello, devait arriver au Burundi dimanche, et y rester trois jours, pour exhorter toutes les parties au "maximum de retenue" et à la "reprise du dialogue", selon le département d'Etat.

De son côté, le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir lundi pour évoquer l'escalade des tensions dans ce pays. La crise a déjà fait au moins 200 morts depuis la fin avril, et quelque 200 000 réfugiés.

Avec AFP

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